Du role des légistes dans la Révolution : discours prononcé à l'audience solennelle de rentrée la 3 novembre 1880

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bration du mariage religieux ; que ce refus peut être un sujet de discorde; qu'il est à coup sûr un outrage à la femme, qui veut être épouse et non concubine.

Toute règle, Messieurs, souffre une exception, et tout principe conçu et formulé par la raison humaine peut, en quelque point, être attaqué. Ce cas particulier que l’on invoque ne saurait suffire à détruire les bienfaits que la sécularisation du mariage nous a procurés, et, pour ma part, je refuse mon estime à ce mari qui à menti à sa conscience ou manqué à ses promesses. Sa conscience lui commandait de faire connaître ses idées et ses croyances. Il à tout caché, ou bien il à mis le masque de l'hypocrisie sur sa figure, fait un serment qu'il ne voulait point tenir et trompé celle qu’il a voulu pour compagne, et qui, rassurée et confiante, l’a choisi pour époux. Ne le plaignons pas si les Tribunaux, saisis de l’action d’une femme justement irritée, apportent à cette situation particulière et douloureuse le remède de la séparation de corps (1).

On a dépeint encore la situation d'un prêtre appelé au chevet d’un mourant, et trouvant à ce chevet « une femme, des enfants, point d’épouse. » Il est impossible, a-t-on dit, de faire les publications et de célébrer le mariage civil. Or le temps presse. Le prêtre est placé entre son devoir et l'obéissance à la loi. Que fera-t-il ? « Trop souvent le prêtre s'éloigne sans avoir pu dénouer « ce nœud fatal, et le moribond, privé des sacrements « qui sauveraient son âme, n’a pas même, à sa dernière « heure, la consolation de laisser à ceux qu'il quitte le « droit de porter un nom dont ils n'aient pas à rou« gir » (2).

(1) V. Duvergier, Domolombe — arrèt de la cour d'Angers du 29 janvier 1859.

Dijon, 4 janvier 1860. — Cassalion. Rejet. 20 novembre 1860. (2) Le père Daniel, — Le mariage chrétien et le Code civil.