Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

4o LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE

marché *. On l'avait déjà vu lors de l'émeute de 1623, au faubourg Saint-Marceau, où la populace mit au pillage justement les maisons où, demeuraient les arlisans huguenots. En 16/45, la corporation des lingères de Paris exclut de son sein les filles et les femmes de la « religion prétendue réformée ». Dix-neuf ans après, on annula toutes les lettres de maîtrise qui ne portaient pas la mention de « catholique, apostolique et romain ». Il en était de même pour les Juifs, qui à Bordeaux et à Metz inspiraient de la jalousie aux négociants catholiques. Ceux-ci ne se génaient pas pour lancer des calomnies ou accréditer des bruits infâmes, afin d'obtenir l’expulsion de leurs concurrents.

Les Parlements n'étaient guère plus tolérants ; et, d’ailleurs, ils avaient reçu des procureurs généraux l'avis d’appliquer et d'interpréter les Édits concernant le culte réformé, dans le sens le plus étroit”. Les Réformés, malgré les Cham bres mi-partie, ou les Chambres de l'Édit, avaient de la peine à y obtenir la place qui leur était due. Par exemple, au Parlement de Rouen, il n'était pas de vexations qu'on ne fit subir aux conseillers de la religion réformée, pour tâcher de les dégoûter de leur office et de leur faire donner leur démission. Le Parlement de Metz ne fut pas moins intolérant envers la colonie juive de cette ville, et, après avoir commis une erreur judiciaire énorme, réclama leur expulsion (1669). En fut, la grande majorité des magistrats était imbue de l'idée de Punité catholique.

Le Parlement de Paris était plus équitable que les autres et pourtant ce ne fut qu'après que la controverse Janséniste l'eut mis aux prises avec l’archevèque de Paris et une partie

1. Ce fail a été mis hors de doute par M. P. Gachon dans son livre si lortement documenté sur « Quelques préliminaires de la Révocation de l'Edit de Nantes en Languedoc. Toulouse. 1899. » La poussée vint d'en bas, dit-il, de la corporation, de l'atelier urbain, comme de la rue villageoïise et de leurs représentants dans les Elals provinciaux (p. 9 cet 10).

2. Voyez page 30, en note, le discours d'Omer Talon aux GrandsJours de Poitiers (1634).