Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

DEPUIS LA MORT DE MAZARIN JUSQU'A L'ÉDIT DE TOLÉRANCE AI

du clergé, qu'il comprit — mais un peu tard — les dangers d'une religion d'État, et réclama la liberté des sacrements pour les Jansénistes”". Mais n'y avait-il pas inconséquence à réclamer pour les Jansénistes la liberté de conscience, qu'on déniait aux protestants ? Et les Jésuites n’avaient-ils pas sur eux l'avantage d’être logiques en persécutant, avec le même zèle, Jansénistes, huguenots et juifs? Quand on adopte le principe d'autorité absolue en matière de foi, il faut bien en mesurer les dernières conséquences.

I y avait en France, cependant, au milieu du xvu° siècle, une puissance plus forte que l'opinion publique qui n'avait encore que peu et de faibles organes pour agir, plus forte que la voix du clergé, quelque ascendant qu'il eût el par ses richesses et par la direction des consciences, plus forte mème que les arrêts des Parlements, c'était la volonté du Roi. Sous le règne de Louis XIIT et dans la première partie de celui de Louis XIV, le pouvoir personnel du Roi avait été modéré et pour ainsi dire contre -balancé et tenu en équilibre par la sagesse d’un Richelieu et d’un Mazarin, qui S'inspiraient encore des principes de justice et de liberté, proclamés par Henri IV. Mais avec Louis XIV, gouvernant seul, c’est la volonté personnelle du Roï, à peine contrôlée par un semblant de conseil, qui triomphe et qui s'impose à toutes les aulorilés judiciaires et même ecclésiastiques de l'État. Ce fut un des premiers actes de Louis XIV, après la mort de Mazarin, que de rappeler aux cours, prélendues souveraines, les droits suprèmes de la justice royale et lobéissance qu'elles devaient au Conseil du Roi, c'est-à-dire au Roi lui-même.

La question de la liberté des cultes se trouvait done, en dernière analyse, dépendre du bon plaisir du Roi. Quelle conduite allait tenir Pautocrate ? Avait-il un dessein prémédité de supprimer toutes les garanties octroyées par les Édits aux non catholiques ? ou bien voulait-il, comme Richelieu, les main-

tenir dans l'exercice limité de leur religion et la Jouissance

1. V, Elie Bexoir. Histoire de l'Edit de Nantes, livre XXI.