Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

DEPUIS LA MORT DE MAZARIN JUSQU'A L'ÉDIT DE TOLÉRANCE {7

Si l'exclusion systématique des réformés de toute grâce et de tous honneurs était une restriction de la liberté religieuse, les gratifications pécuniaires payées aux NOUVEAUX convertis n'étaient pas une moins grave offense à la dignité de la conscience. On a vu plus haut que les assemblées du clergé étaient, dès le règne de Henri IV, entrées dans cette voie équivoque en constituant un fonds pour l'entretien des ministres convertis, qui, petit à petit, fut porté à 36 000 livres, puis à 69 000.

Louis XIV suivit le clergé dans celle voie et crut que 1 consciences de ses sujets: rélormés étaient à vendre. Il fonda une «caisse dite des conversions » alimentée par le revenu du tiers des économats !, et dont on augmenta les ressources

n prolongeant la vacance des bénéfices et il en confia la Set à Pellisson, un protestant apostat. ( Celui-ci fit de celte caisse une véritable banque, avec ses larifs, ses lettres de change et ses opérations. Il en vint à présenter des listes de 600 et jusqu’à 8oo convertis, dont on insérait les certificats dans la Gazette de France. Les abus auxquels donna lieu cette caisse ne firent pas renoncer à l'emploi de ce moyen immoral; par des arrêts de 1680 et 16871, on accordait à tous les nouveaux convertis un délai de trois ans pour le paiement du capital de leurs dettes, et on les exemptait pour deux années du logement des gens de guerre et des autres contributions militaires.

Après l'exclusion des grâces pour les dissidents opiniâlres, et les primes pécuniaires aux nouveaux convertis, le Roi en vint aux dénis de justice, au retrait successif de toutes les libertés de culte et d'éducation, et à la suppression des garanties de justice et de sécurité des personnes, qui avaient été octroyées par l'Édit de Nantes, et confirmées par tous les Rois, depuis Henri IV jusqu'à lui-même, y compris. Et cette fois, on ne put pas, comme au début du règne de

1. On appelait ainsi les bénéfices vacants, dont le revenu appartenait au Roi.