La caricature anglaise au temps de la Révolution française et de Napoléon

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culottes, suçant des ciboules et des limaces, s’écrie (en français): « Sacrebleu, quel bienfait que la liberté! » Cruikshank reprend ce thème avec plus de détail : « Bonheur français, misère anglaise. ; D'un côté, quatre maigres Français, qui ont des cocardes à défaut de culottes, se disputent un oiseau étique. À l'arrière-plan, des assignats dépréciés, une tête sur une pique, un pendu à la lanterne, un bébé sanglant fils d’aristocrate, un petit arbre de la liberté dans une casserole. Au premier plan, une cruche d’eau fêlée, un chat mort de faim. De l’autre côté, quatre gras Anglais autour d'un jambon et d'un pudding. Un bon feu de charbon, des pots d’ale mousseuse. Par la fenêtre on aperçoit un gras laboureur qui ensemence son champ. Sur le mur s'étalent des formules loyalistes: Xing and constitution for ever.

Si l'on tient aux vieilles institutions de la monarchie nationale, ce n'est pas que l'on ménage beaucoup les personnes royales existantes. Ce roi George III, que nous verrons si populaire dans la lutte contre Napoléon, Gillray l'avait pris depuis longtemps pour le point de mire de ses railleries, sans parler d’indicibles grossièretés. Une des plus spirituelles est son « Connaisseur examinant une miniature.» Le roi, s’éclairant d'un bout de chandelle économiquement planté sur un brüle-bout, fait la grimace en reconnaissant un portrait du régicide Cromwell : or nous sommes en 92! Vengeance de l'artiste, a-t-on dit, contre un souverain qui avait dédaigné son talent. Ce qui est certain, c'est que George, comme sa femme, passait pour avare, malgré les énormes dépenses où l'entrainait naguère la corruption parlementaire. Si les choses ont changé depuis le ministère Pitt, la parcimonie n'a fait qu'augmenter chez le « fermier George » et chez la « fermière, » qui a mis au monde tant de princes peu