"La Guzla" de Prosper Mérimée : étude d'histoire romantique (oštećen primerak)

LA BALLADE POPULAIRE AVANT « LA GUZLA ».

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Il fut remarqué tout d’abord par Barthélemy Kopitar, de la Bibliothèque Impériale autrichienne, qui était un philologue slave distingué. Les conseils de Kopitar furent d’un prix inappréciable pour le jeune Karadjitch, à qui l'instruction des écoles avait manqué. Grâce à lui, Karadjitch fit la connaissance de Jakob Grimm, célèbre érudit allemand, qui établissait alors les bases de cette méthode scientifique appliquée à l’histoire nationale, d’où sortira non seulement la mythologie comparée, mais encore, comme nous l’avons déjà dit, le folklore et la philologie comparés. Diez pour les langues romanes, Zimmer pour les langues celtiques, feront plus tard seulement ce que Jakob Grimm avait fait déjà pour les langues germaniques. Par suite de l’enthousiasme général qu’on avait à cette époque pour les études indo-germaniques, une grammaire serbo-croate était devenue nécessaire ; on cherchait d’autre part des spécimens de la langue serbocroate. Il n’était pas facile de s’en procurer, car la langue littéraire des Serbes orthodoxes du temps n’était qu’un mélange arbitraire du russe, du serbe et du slave ecclésiastique; celle des Croates catholiques n’était qu’un pauvre patois demi-slovène. On découvrit alors Karadjitch, jeune homme de talent 1 , qui connaissait à

1 Sur l’œuvre de Karadjitch on peut consulter : A. N. Pypine et W. D. Spasowicz, Histoire des littératures slaves, Paris, 1881, pp. 299-307 ; Lioubomir Stoyanovitch, Vouk S. Karadjitch, Belgrade, 1899 (en serbe). L’article « Karadjitch » dans la Grande Encyclopédie est bon, mais trop court ; celui de la Biographie générale (Didot) ne vaut rien, de même que celui de la Biographie universelle (Michaud). Dans ce dernier répertoire, Karadjitch est inscrit sous le nom incroyablement déformé de « Wurk ». Ajoutons qu’un jugement définitif sur le « père de la littérature serbe » ne sera possible qu’après la publication complète de sa très volumineuse correspondance, dont les trois premiers volumes sont déjà sortis de l’imprimerie Nationale serbe.