La terreur à Paris

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ment. La réclusion devint dure, on refusa de laisser entrer même des aliments. Le tribunal, sur les ordres de Fouquier-Tinville, considérait les prisonniers comme des bêtes, leur refusait le nécessaire et chaque jour lacharrette en enlevait une trentaine qui allaient donnerleur tête pour le salut de la Commune de Parisetla gloire de la République une et indivisible.

Un jour, raconte un des prisonniers, un des agents de Fouquier-Tinville vint à la prison avec une liste que son maitre lui avait dit contenir dix-huit noms. Il en fait l’appel, et n’en trouve que dix-sept. « Mais, dit-il au guichetier, Fouquier m'a dit de lui amener dix-huit contrerévolutionnaires, il me faut encore ‘une pièce. » Un malheureux suspect passant alors devant lui, il lui demande son nom. Celui-ci le décline. « Oui, dit-il, c'est

‘toi, » et il Le fait emmener par les gendarmes. Le lendemain, il fut guillotiné.

Une autre fois, un de ces agents appelait dans la galerie un détenu, d'environ cinquante ans, dont je ne me rappelle pas le nom, mais que je sais avoir été officier général en Corse. Celui-ci n'entendait pas, ou, sachant de quoi il s'agissait, ne se pressait pas de répondre. Un jeune étourdi, d'environ dix-sept ans, jouait à la balle dans la galerie ; il entend un nom à peu près conforme au sien, et demande si ce n’est pas lui qu'on appelle. « Comment te nommes-tu ? — N... — Oui, c'est toi; viens au guichet. » On l’entraine à la Conciergerie, et le malheureux eufant de dix-sept ans est guillotiné en place d’un homme de cinquante.