Le Monténégro contemporain : ouvrage orné d'une carte et de dix gravures

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bal du sang. Dans le cercle d'une danse aux allures lentes et mélancoliques, arrive le coupable découragé et confus, ayant le fer homicide pendu en bandouillère et marchant à quatre pattes. Tandis que les danseurs semblent l'éviter et se le renvoyer réciproquement, il crie par trois fois à haute voix: « Pardon! » Loin de se rendre à cette supplication, le parent le plus proche du défunt prie le plus vénérable des juges de chasser ignominieusement le misérable. Le juge obéit, et à coups de pied le jette à terre ; mais à peine at-il touché la poussière, qu'il crie d'une voix désespérée : « Pardon, au nom de Dieu ! » Alors s'arrête la danse, et s'élève un concert de gémissements et de lamentations. Apaisé par celte scène, le parent soulève de terre son ennemi, prend son arme, l’enlace et lui donne un baiser; puis, se tournant vers l'assemblée, il s'écrie : « Cet homme que je regardais comme mon ennemi implacable, dès aujourd'hui ne l’est plus; dorénavant il sera mon ami, mon frère, et non-seulement pour moi, mais pour vous tous, parents à tous les degrés du mort que nous avons chéri. » Et en prononçant ces paroles il brise en deux portions une monnaie d'argent et remet l'une des moiliés à son nouveau frère. Tous deux garderont serupuleusement ce fragment en mémoire perpétuelle de leur réconciliation. Ces cérémonies accomplies, le plus àgé des juges prononce la sentence qui fixe le prix du sang, variant de cinquante à cinquante-quatre sequins d'or, et pouvant représenter jusqu’à douze meurtres accomplis. Une partie de cette somme appartient à l'église, l'autre sert à couvrir les dépenses du jugement, et la troisième revient à la famille de la victime. Quelquefois celle-ci est apaisée à beaucoup moins de