Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

LES TROIS CLERGÉS 17

allait de soi que l'Église fût sous la protection du monarque, « comme un mineur sous la garde de son tuteur (1). »

Aucun Ordre, fût-ce le premier de l'État, aucun individu, füt-il consacré, évêque ou moine, aucune propriété, se prétendit-elle de droit divin comme la couronne elle-même, n'avait de privilége exclusif que du bon plaisir du roi, le premier, l'unique représentant de Dieu sur la terre, pour les choses temporelles du moins.

Au point de vue spirituel, le roi daignait reconnaitre au vicaire de Jésus-Christ « la principale part dans les questions de foi, » mais il déniait au pape la puissance de « le déposer et de délier ses sujets du serment de fidélité (2). »

« I n'ya, » répétait l'arrêt du conseil du 24 mai 1766, « aucune puissance qui, sous quelque prétexte que ce soit, puisse en aucun cas affranchir les sujets de la fidélité inviolable qu'ils doivent à ieur souverain ; » car « la puissance temporelle, émanée immédiatement de Dieu, ne relève que de lui seul. » Que si l'Église a reçu de Dieu « le droit de décider et pratiquer ce qu'il faut croire dans l'ordre de la religion, il n'est pas moins incontestable qu'il dépend du pouvoir temporel d'autoriser la publication des décrets de l'Église et de les rendre lois de l'État. » Le droit du souverain, « évéque du dehors et vengeur des règles anciennes, ne s'étend point à imposer silence aux pasteurs dans l’enseignement de la foi et de la morale évangéliques ; mais il empèche que chaque ministre ne soit indépendant en ce qui concerne les fonctions extérieures appartenant à l'ordre public. » Il peut et doit « écarter du royaume les disputes étrangères à la foi, déclarer abusifs et non valables les vœux qui n'auraient pas été formés selon les lois cano-

(1) La comparaison est extraite du Traité de l'autorité des rois, que rédigea, par ordre royal, le maître des requêtes Le Voyer de Boutigny, à la fin du dix-septième siècle.

° (2) Déclaration de 1682.