Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits
LES TROIS CLERGÉS 27
des religieux attachés à leur état, les deux autres souhaitant de rentrer dans le monde. »
Ce qui depuis les fabliaux du moyen-âge était le plus méprisé du peuple, ce qui avait toujours le plus indigné les curés de campagne, comme leurs paroissiens, la mendicité monacale s’exerçait encore, tirant, Bon an mal an, des plus pauvres cullivateurs, en sous, en liards, en aumônes manuelles, en véritables captures de lard, de vin, de menus objets de consommation, quelque chose comme 5 à 6 millions de livres (1).
Les collèges, les hôpitaux, les asiles, dépendants des monastères, servis par des moines et des sœurs, avec subvention de l'Etat ou des provinces, étaient dans la situation la plus déplorable (2). L'hospitalité, la charité, l'éducation, qui avaient autrefois servi de prétexte à l’enrichissement de l'Eglise, étaient par elle presque totalement abandonnées.
Dans les communautés, non plus de bienfaisance, mais de contemplation, les règles sur l'habit, la clôture, l'obéissance, n'étaient plus guère observées.
Personne n'allait aux offices de nuit, que la cloche sonnait toujours, par habitude. Les repas étaient presque partout des occasions d’intempérance et de dispute. Ici, les frères battaient le prieur qui les rappelait au devoir (3). On le faisait même quelquefois disparaitre en mettant le feu au couvent, et ce n’était point une exception que « l’abbaye de Clairvaux changée en Thélème », pour parler comme l'abbé D. Mathieu (#).
(1) A. Bailly, Histoire financière de la France, 2 vol. in-8° 1830, t, Il, p. 422-424.
(2) V. les célèbres Mémoires de Tenon sur les Hôpitaux en 1786-1788 et les Observations sur Bicétre de Mirabeau. La décadence des collèges, l'absence d'écoles dans les campagnes sont signalées par les cahiers de 1789, et par ceux du clergé non moins vivement que par ceux de la noblesse et du tiers état.
(3) Wallon, p. 30).
{#) P. 34 de son intéressant ouvrage sur l'Ancien régime en Lorraine et Barrois.