Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

40 LES CAHIERS DES CURÉS

ecclésiastiques sous l'Ancien régime rendent irréfutable le raisonnement de Turgot contre les fondations.

Par exemple (1), 39 prémontrés avaient, d’après leur propre estimation, 45 millions de propriétés, leur donnant un revenu annuel de plus d'un million. Les dominicains de Toulouse, au nombre de 236, se reconnaissaient « plus de 208,000 livres de rentes de revenu net, non compris leurs couvents et leurs enclos, et, dans les colonies, des biensfonds, des nègres et autres effets (sic), évalués à plusieurs millions ».

Les bénédictins de Cluny, au nombre de 298, avaient 1,800,000 livres de rentes ; ceux de Saint-Maur, 1,672. Leur fortune s'élevait à 8 millions, plus égale somme retournant aux abbés et prieurs commendataires, n'exerçant aucun office, résidant à la cour ou à Paris ; sans compter le mobilier de leurs églises et de leurs maisons, apprécié 24 millions. L'abbé de Clairvaux avait à lui seul de 3 à 400,000 livres de rentes.

Dans le Cambrésis, le clergé possédait 1,400 charrues sur 1,700; dans le Hainaut et l’Artois, les trois quarts des terres étaient à lui; il en avait la moitié dans le Roussillon, dans l’Alsace, dans la Franche-Comté, où le chapitre noble de Saint-Claude mainténait en servitude au moins 20,000 cullivateurs du mont Jura.

D'après l'Almanach royal et la France ecelésiustique de 1788, où M. Taine a puisé sans rien laisser à découvrir après lui, le revenu des cent trente-un évèques et archevêques — le revenu avoué, non le véritable, « qui était de moitié en sus », — est porté en bloc à 5,600,090 livres. « Cela donnerait 50,000 livres par tête, dans l'imprimé ; mais, en fait, c'était 100,000 livres. »

(1) Relevons-nous dans le livre de M. Taine, I, p. 19, (2) I, 54-55.