Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

LES TROIS CLERGÉS ol

A Saverne, une vraie cour de roi est tenue parles Rohan, évèques héréditaires de Strasbourg et cardinaux d'oncle en neveu.

IF y avait dans leur château 700 lits, 180 chevaux, 14 maitres d'hôtel, 25 valets de chambre. On y put loger, en une fois, jusqu'à 200 invités, non compris la valetaille. On y rencontrait en tout temps « de vingt à trente femmes, des plus aimables de la province », auxquelles souvent venaient se joindre des dames de Versailles et de Paris, en villégiature. Ce monde soupait chaque soir à neuf heures, sous la présidence du cardinal, superbement vêtu, beau et le teint sans cesse raffraichi par des baïns de lait (1), d'une galanterie exquise, distribuant des sourires en guise de bénédiclions (2).

On sait combien la grâce cardinalesque, ne connaissant plus d'obstacles, compromit Marie-Antoinette en personne, vers 1785, et quel coup terrible l'affaire du collier acheté à crédit 1,600,000 livres, volé par une aventurière, Mme de la Motte-Valois (3), porta à la vertu de la reine, à l'honneur du trône, à la délicatesse de la noblesse et à la considération de l'Eglise!

(1) Wallon, Le Clergé de 89, p. 493.

(2) Taine, l'Ancien régime, p. 156.

(3) V. la première partie des Mémoires du comte Beugnot et le curieux travail de M. Campardon, Marie-Antoinette el le procès du collier.