Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

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ment il pouvait être « déposé, dégradé, excommunié, » pour les cas graves, et, pour les moindres, « suspendu » à temps ou pour toujours, localement ou personnellement. Il pouvait encore subir un « interdit » partiel, général, local ou personnel, ou « mixte, » comprenant les deux. Cela ecclésiastiquement, sauf « l'appel comme d'abus » à l'autorité des cours souveraines et du roi (1).

Il va sans dire que le recours en abus, presque inoffensif contre le haut clergé, était d’une inefficacité absolue en faveur du clergé inférieur.

Les évèques, les seigneurs, les paroissiens « de marque » — pourvu qu'ils eussent à leur disposition l'oreille et le bras d’un intendant, — employaient contre les curés qui les gènaient ou leur déplaisaient des « lettres de cachet. » Get exécrable abus du favoritisme nobiliaire et de l'autocralie royale, qui enflamma la colère de Mirabeau, resta en pleine vigueur dans le monde clérical jusqu'au moment de la Révolution. L'abbé Mathieu (2) raconte l'incroyable histoire du curé de Trois-Vallois, diocèse de Saint-Dié, que son évèque, simplement parce qu'il s’obstinait dans un procès avec ses paroissiens, fit enfermer deux ans au prieuré d'Hérival, fit reprendre, parce qu'il se plaignait au roi, et livra aux « frères fouetteurs » de la maison de force de Marseille, sans jugement d'aucune sorte, par simple « lettre de cachet! »

Ces lettres, fait remarquer Rozet (3), s'expédiaient avec d'autant plus d'abondance que le temporel du prisonnier était saisi et s'administrait à l’aide d’un desservant, indemnisé au taux Le plus médiocre. L'évèque jouissait des rentes

(1) L'abbé Fleury, fstitution au droit ecclésiastique, ch. x1x, XXI, XXI, de la 3e partie.

(2) P, 119-123.

(3) IL, 169-170.