Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

LES TROIS CLERGÉS 83

propositions de Quesnel, que le jésuitisme haïssait le plus : « La crainte d’une excommunication injuste ne doit pas nous empêcher de faire notre devoir. »

Cette indépendance de la conscience, maintenue malgré la bulle de 1713 par leurs prédécesseurs, les jansénistes de la fin de l'Ancien régime l’exercèrent pour se réconcilier de mieux en mieux avec la philosophie.

Voltaire avait fini par apprivoiser «le tigre janséniste », et rendre tolérants les juges de Calas.

Jean-Jacques Rousseau, avec son Vicaire savoyard, très lu dans les séminaires, très répandu dans les presbytères, avait suscité un profond mouvement de démocratie chrétienne, qui ne servit pas peu à déterminer, au moment décisif de la rédaction des Cahiers, l'union d'intérêts et d'aspirations des curés à portion congrue et des paysans, contre les privilégiés nobles et ecclésiastiques, pour la revendication de l'égalité et de la liberté, pour la déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

XX LE BON CURÉ SELON VOLTAIRE ET TURGOT

« Bannir l'idée religieuse de l'État, où elle ne peut être qu'une cause de trouble et d'oppression, pour lui faire reprendre dans la conscience individuelle la place modeste mais sûre que lui assignent l'insuffisance de sa certitude et la valeur nécessairement hypothétique de ses affirmations » : voilà, écrivait P. Lanfrey en 1856 (1), tout le génie du dix-huitième siècle el son but.

(1) L'Église et les philosophes, p. 373.