Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

LES TROIS CLERGÉS 85

Durant son intendance à Limoges, il considérait les curés, rapporte Dupontde Nemours (1),« commeses sub-délsgués naturels ef assurait qu'on était trop heureux d'avoir, dans chaque paroisse, un homme qui eût reçu quelque éducation, et dont les fonctions dussent, par elles-mêmes, lui inspirer des idées de justice et de charité. »

Le premier des fonctionnaires royaux, lors de la disette de 1770-1771, il adressa des circulaires officielles aux misérables desservants des villages, et les releva à leurs propres yeux, les faisant les agents de l'autorité royale pour la distribution des secours aux affamés, pour l’organisation des bureaux et ateliers de charité, pour la contrainte morale et au besoin matérielle à exercer sur les propriétaires tenus de subvenir à la subsistance des cultivateurs jusqu’à la récolte prochaine (2).

Le curé — administratif — tel que le souhaitait ce ministre de Louis XVI, eût admirablement réalisé le type social, présenté, dans le Catéchisme du curé, par Voltaire.

Ce dialogue, entre Ariston et Théotime /3), mérite d’être en majeure partie reproduit, tant il est spirituel, cordial, et tant il reste actuel au bout de plus de cent ans.

« — Eh bien, mon cher Théotime, vous allez donc être curé de campagne ?

«—— Oui, on me donne une petite paroisse et je l'aime mieux qu'une grande. Je n'ai qu'une portion limitée d’intelligence et d'activité : je ne pourrais certainement pas diriger soixante-dix mille âmes, attendu que je n’en ai qu’une: un grand troupeau m'effraye, mais je pourrai faire quelque bien à un petit.

« J'ai étudié assez de jurisprudence pour empècher, au-

(1) Œuvres de Turgot, éd. Guillaumin, & 1, p. 633.

(2) Voir les lettres circulaires aux curés, 1. 11 des OEuvres de Turgot.

(3) Enfoui dans le Dictionnaire philosophique.