Les Cahiers des curés : étude historique d'après les brochures, les cahiers imprimés et les procès-verbaux manuscrits

LES FROIS CLERGÉS 93

restant à-son humble place et dans son rôle, né voulait pas prononcer la damnation des infidèles et dire : « Hors de l'Eglise point de salut ! » qui se refusait en même temps à blasphémer contre la justice et à « mentir contre le SaintEsprit. »

Le curé que les politiques désiraient, que les philosophes acceptaient et que les prêtres plébéiens aspiraicut à devenir était bien celui qu'eût voulu être le Vicaire Savoyard, s'écriant :

«Je ne trouve rien de si beau que d'être curé. Un bon curé est un ministre de bonté, comme un bon magistrat est un ministre de justice... Oh! si jamais dans nos montagnes, j'avais quelque pauvre cure, de bonnes gens à desservir !... je serais heureux; car il me semble que je ferais le bonheur de mes paroissiens.

« Je ne les rendrais pas riches, mais je partagerais leur pauvreté; j'en ôterais la flétrissure et le mépris, plus insupportable que l'indigenee. Je leur ferais aïmer la concorde et l'égalité, qui chassent souvent la misère et la font toujours supporter. Quand ils verraient que je ne serais en rien mieux qu'eux et que, pourtant, je vivrais content, ils apprendraient à se consoler de leur sort et à vivre contents comme moi.

« Dans mes instructions, je m'attacherais moins à l'esprit de l'Église qu’à l'esprit de l'Évangile, où le dogme est simple et la morale sublime, où l'on voit peu de pratiques religieuses et beaucoup d'œuvres de charité. Avant de leur enseigner ce qu'il faut faire, je m'efforcerais toujours de le pratiquer, afin qu'ils vissent bien que tout ce que je leur dis, je le pense.

« Si j'avais des protestants dans mon voisinage ou dans ma paroisse, je ne les distinguerais point de mes vrais paroissiens en tout ce qui tient à la charité chrétienne, je les porterais tous également à s'entr'aimer, à se regarder