Lettres sur la révolution française : par J. Gorani, citoyen français, à son ami Ch. Pougens

FRANCATISE.

dans la difpenfation de vos générofités & dans le choix de vos confdens , me firent prévoir dès-lors les défordres de votre règne. Cependant, comme vous paroïiffiez convaincu de l'amélioration dont la culture des Étatg Sardes étroit fufceptible, & difpofé à faire cette utilé conquête, cette efpérance jointe au délir que j’avois de vous aider à faire le bien, me déterminèrent à traces le plan de gouvernement qui convenoit à votre fituaz tion, & dont l’éxécution étoit d'autant plus facile alors; que votre père vous laïfloit 4o millions dans le tréfor , un revenu de 3o millions, & pas un fous de dette; je remis ce plan à un de vos miniftres, en le priant de vous le communiquer; s’il vous en a donné connoiflance, fire | vous n’en avez fait aucun ufage ; &, sil vous l'a caché, c’eit que peut-être il l’a trouvé Peu concordant avec vos malheureufes inclinations pour le defpotifme & pour la profufon ; inclinations qui font ordinarement cultivées avec le plus grand foin dans les monarques par leurs miniftres & leurs cour: tifans.

Bientôt je prouverai, fire, par le tableau hiftoriqué de votre règne ; que je n’ai pas ceflé de vous obferver, & que j'ai la connoïffance la plus exa@e de votre conduite & de toutes vos affaires ; aujourd’hui je me hâts de vous fecourir par des vérités, qui, quelques dures qu'elles fôient, doivent opérer votre falut, fi vous ne les confultez que dans le fein de votre famille.

Pourquoi, fire, voit-on encore dans le pays le plus favorifé par la nature, dans le Piémont, dans le Canavèfe & jufques aux portes de Turin, des friches, des

bruyères qui pourroient être facilement converties en excellentes prairies artificielles ?

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