Lettres sur la révolution française : par J. Gorani, citoyen français, à son ami Ch. Pougens

40 RÉVOLUTrOoN

induftrie ; & le Milanoiïs qui, depuis fi long-tems , gé mit fous la plus dure oppreffion, fe donneroit à vous ; & vous feriez en état de foutenir cette conquête; bien loin de là, vous ne pouvez point vous défendre, parce que vous n’avez qu’une armée d’efclaves fans tadtique » fans difcipline, fans force, fans courage , fans patriotifme ; vous n’avez plus ni tréfor, ni crédit ; enfin, au lieu de jouir de Ia paix de votre ame , de l’eftime de vous-même, de celle des autres, de la confiance & de Yamour de vos peuples ; vous êtes généralement méprifé au-dehors , & détefté chez vous; les foupcons, les défances, les inquiétudes les plus fondées , la perfpedive le plus effrayante , les préfages les plus finiftres , les remords, la terreur vous pourfuivent par-tout & vous tourmentent jour & nuit.

Comment, fire, dans une fituation auffi malheureufe, aufli menaçante pour votre couronne > AVEZ-VOUS eu l’imprudence d'entrer dans la ligue monftrueufe de Pilnitz? Lifez l’hifloire de tous les fiècles, & vous verrez que toute ligue formée d’une foule de princes ne peut durer long-temps, ni réuffir. Dans ces lignes extravagantes, les puiflances du troifième & du quatrième ordre, tel que le vôtre, ne jouent qu’un miférable rôle ; elles ne font que les fatellites des potentats qui les emploient, & elles finiflent par en être les dupes. Vous verrez, fire, que la ligue armée par lempirique oélogénaire de miniftère de Vienne , aura le fort de celle de Cambrai, & vous refterez expofé au reffentiment de la plus grande Nation de l’Europe, qui fe vengera avec éclat de tout le mal que vous aurez voulu Jui faire. Quelle folie d’expofer votre poignée de mauvaifes troupes aux fureurs de cent mille