Lettres sur la révolution française : par J. Gorani, citoyen français, à son ami Ch. Pougens

78 RÉVOLUTION qui leur font perdre le plus de tems, & qui ies familia= rifent avec le meurtre & le fang , tels que la chafle & la pêche. Leurs talens confiftent auffi à femer ladivifion dans la famille royale, afin qu’il y ait toujours à la cour deux partis contraires, entre lefquels fe partage chaque famille de courtifan & de miniflres, pour qu’en tout événement, une partie de chacune de ces familles foit toujours en faveur ; cette difcorde peïpétuelle dans la famille royale prolatl des cabales & des fcènes dont les courtifans & leurs femmes fe diftribuent les principaux rôles , & c’eft par ce moyen qu'ils alimentent leur éd. leur influence, leur ambition, leur avidité, leur orgueil ; & pendant que les rois s’occupent de ces tracafferies, de chafle, de pêche ou de débauches, leurs miniftres & leurs courtifans reftent les maîtres de faire tout ce qui leur plaît. La fcience de ces gens-là confifte encore à fe compofer un maintien digniteux & un protocole de phrafes infignifiantes pour répondre à tout de vive voix & par écrit, fans fe compromettre; à fe faire des partifans par la corruption ; à perfécuter ies hommes attentifs à leur conduite &c dangéreux pour eux par leurs lumières & leur patriotifme ; à répandre des efpions par-tout, pour les découvrir ; à imaginer des monopoles & des agiotages auxquels ils s ’aflocient, &c des impots , dont la répartition & la perception , foient arbitraires & le produit inconnu, afin d'éviter Îes preuves de leurs injuftices & de leurs rapines : elle conffte, enfin, à multiplier Les branches de l’adminiftration , pour ngmenter leurs richefles & leur autorité, & à com= pliquer les refforts du gouvernement de la manière la plus ténébreufe, pour cacher leurs fottices &c l£urs crimes, pour fe rendre perpétuellement néceffaires, &