Louis XVI et la Révolution

288 LOUIS XVI ET LA RÉVOLUTION.

« Le roi écoutait un grand nombre de conseils, et il les amalgamait en les gâtant tous. » Il avait eu un premier tort : ç’avait été de laisser deviner ses desseins ; dès le mois d'octobre 1790, beaucoup de personnes sont au courant des intentions de la famille royale; le 9, le comte de Vaudreuil éerit au comte d'Artois : « Le projet est bien ébruité; on en parle dans toutes les lettres; cela est tout au long dans les Bulletins de Barthes, et ce n'est pas ainsi que des projets s'exécutent. » Le second tort de Louis XVI avait été de ne pas partir au bon moment, de tergiverser jusqu’à la dernière minute. MarieAntoinette, parlant au comte Esterhazy du projet de fuite, lui dit « qu'elle désespérait d'y faire consentir le Roi que quand il ne serait plus temps ». Sur le point de se mettre enfin en chemin, Louis XVI retarde encore d’un jour le départ, et ce retard suprême est un danger. Le roi ne sait pas choisir ses compagnons d'évasion : il prend M de Tourzel à la place de M. d’Agoust, dont l’énergique sang-froid pouvait à l’occasion tout sauver. Il interdit au comte de Fersen de le suivre jusqu’au bout, Fersen, dont l'intelligence et l'adresse pouvaient suppléer à tous les mécomptes. En revanche, il exige que l’on place de distance en distance, sur sa route, des détachements de cavalerie, malgré les efforts de Bouillé, qui voit le danger : s’ils sont trop faibles, ils ne pourront rien faire, et s'ils sont trop considérables, ils exciteront la méfiance des gardes nationales; de plus, peut-on encore compter sur le soldat? Et c'est en effet ce qui se passe : le peuple s'inquiète, maîtrise les soldats fidèles, débauche ceux qui hésitent, et qui finissent par abandonner volontiers un roi qu'ils n’ont appris ni à connaître ni à aimer. Ce sont des obstacles plutôt que des secours le long de la route. Quand le projet est éventé, la colère de l’armée éelate : « La disposition des troupes, dit Bouillé, était un délire de fureur contre le Roi, qui se manifesta à Metz et à Verdun principalement. Les canonniers, qui marchèrent de cette première ville à Varennes, dirent à leurs officiers, qu'ils forcèrent