Louis XVI et la Révolution

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lutionnaire, quoique Américain, nous rapporte la version de la cour : « Vicq-d’Azyr nous dit que M. Pétion, un des trois commissaires envoyés par l’Assemblée pour accompagner le Roi, s'était conduit de la plus désagréable et de la plus brutale façon. Assis dans la voiture avec la famille royale, il se permit de se conduire d’une manière indécente, et s’amusa à expliquer à Madame Élisabeth les moyens de composer un conseil de régence. » Dans son Précis historique, le comte de Valory est encore plus agressif : « Le farouche Pétion, manifestant toute l’insolence d’un cynique jacobin, insulta le Roi, la Reine et sa famille, et poussa l'audace jusqu’à exiger que Madame Élisabeth quittât sa place, dans le fond du carrosse, pour la lui laisser occuper. Il s’assit done à côté de son maitre, et s’en attribua la licence jusqu'à Paris. » M% de Tourzel, qui n’est pas tendre pour les commissaires, et qui était mieux placée que le garde du Corps, tout en trouvant Pétion « bavard et insolent », constate qu'il était assis sur le devant de la voiture; elle reconnaît même qu'il fit des reproches à un de ses amis qui s’était approché du carrosse arrêté en affectant de tourner le dos au roi et de garder son chapeau sur la tête. En revanche, il ne cacha pas ses opinions. Louis XVI ne dut être rassuré qu'à moitié sur les conséquences de son escapade par les théories de Pétion. Celui-ci, dit la duchesse de Tourzel, « parlait toujours de l'Amérique et du bonheur des républiques : Nous savons bien, lui dit le roi, le désir que vous auriez d’en établir une en France. — Elle n’est pas encore assez mûre pour cela, répondit-il, et je ne serai pas assez heureux pour la voir établir de mon vivant. » Préfère-t-on la version de Pétion lui-même, saisie dans ses papiers après le 31 mai 1793? La voici, telle qu’elle est reproduite dans l'Histoire de la Terreur de Mortimer-Ternaux, peu suspect de partialité en faveur des révolutionnaires. Répondant à une insinuation de la reine, Pétion s’écria avec énergie : « Eh bien, madame, je vais vous parler avec toute franchise, et je pense que je ne vous serai pas