Michelet et l'histoire de la Révolution française

MICHELET. — HISTOIRE DE LA REVOLUTION FRANÇAISE 14

39 Influence anglaise au xvuue siècle, enfin Révolution et l'ÆJistoire de la Révolution, 1. Ier, avec son Inlroduclion religieuse el politique contre christianisme et royauté.

«Lei j'ai pris parti : :

Et contre royalistes (légilim'stes el anglomanes),

Et contre républicains terroristes,

Et contre chrétiens,

EL contre communistes : Louis Blanc.

€ En 1846: À, par questions : B, par époques el. en 1847, par hommes. »

Les indications et les dates que je viens de donner indiquent suffisamment comment l'Histoire de la Révolution sortit, non pas d'une préparation scientifique lente et méthodique, mais d’un entrainement, d’une improvisation fébrile ; elle fut entreprise sous un souffle d’enthousiasme et de bataille, auquel se mêlaient des orages de vie intérieure. Une note du vendredi 14 février 1845 indique dans quel esprit Michelet entreprit cette œuvre brülante, à laquelle on ne peut rien comprendre sion n'en connaît pas la genèse étrange. Cette note est mêlée de confessions sur sa vie intime et ses fautes cachées.

Cette note. a pour litre :

(ruerre aux Dieux pour Dieu. Avenir !

« La guerre aux Dieux! pour le Dieu de l'avenir, l'éternel. l'immuable dans le muable.

« Gardons le cœur ferme et haut... Nous n'avons que notre cœur !

« Nous, dis-je, et c'est assez.

« Fais donc faire ton individuel et la volupté énervante et les tristesses domestiques,

« le deuil de tant de pertes, toujours présentes... et l'incertitude de ces jeunes existences, liées à la tienne, lous bien chancelans, tous nageant entre espoir et crainte... car il faut que tout l’individuel vacille, tienne à peine, dans cette ferme maison de l'esprit. Done, fais taire tes Dieux domestiques, ton foyer brisé, tes jouissances mélancoliques.

« Tu as à bâtir une pierre. — Edifie et bâtis bien, comme dit Rückert. Toi-même, mal édifié, peu solide, battu de deux ennemis : sensualité, subtilité, qui est la sensualité de lesprit.

« Tu bâtiras mieux que toi-même... Telle est la grâce de Dieu.

« Tu donneras, de toi-même, mieux que ce qui est en toi.

« Tu agiras sur la foule, parce que tu en es, la remuant même par tes mauvais éléments, qui sont les siens. »

Il à fallu tout le génie divinatoire de Michelet, sa puissance inouïe de iravail, pour qu'une œuvre entreprise dans des dispositions d'esprit aussi exceptionnelles, aussi maladives, aussi antiscientifiques, ait cependant une incontestable valeur historique, et tienne une place, non seulement honorable, mais brillante dans la série des ouvrages auxquels l’histoire de la Révolution à donné naissance.