Oeuvres diverses
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En socialisme, M. Simon est de l’école de Pangloss,
avec moins de logique et de grandeur. Pangloss est convaincu ; misérable jouet du sort, Pangloss dit à la douleur qui le dévore : « Non, tu n’es pas un mal. » Assis dans un sopha, en face d’une table bien servie, ses successeurs bâtards disent au peuple qui pleure et qui souffre : pleurez, souffrez, vous êtes bien heureux, le paradis est à vous: « Sommes-nous riches ?
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Nous avons les habitudes des riches, il nous faut des appartements élégants, du feu en hiver, de l'air en été, de bons mets, des vins fins, des domestiques. Tout cela ne nous réjouit guère, c’est en quelque sorte notre pain quotidien. Nous souffririons d'en être privés, nous remarquons à peine que nous l'avons, ete. » Alors vient la contre-partie: « Entrons dans la demeure du pauvre. Est-ce une maison ? Non, la langue lui donne un autre nom, c'est une chaumicre. Entrons là, voici un espace où ne tiendrait pas l’antichambre du riche. L'air n’y vient pas parce qu'il y a un impôt sur les fenêtres. En revanche, le vent et la pluie y pénètrent par les toits effondrés, par les murs lézardés. Point d'autre sol que la terre dure et humide, ete. Quelle vie? Ne disons pas qu’on s’y habitue jusqu’à ne plus souffrir de la misère, ne berçons pas notre égoïsme de cette vaine pensée ; mais disons, car cela est vrai, que la Provtdence veille sur ses abandonnés, qu'elle émousse exprès leurs sens pour que la douleur ait moins d’aiguillons, qu'elle endurcit leurs corps aux privations et à la fatigue, qu’elle endort leur imagination pour que le regret du bonheur absent n’ajoute pas à la misère présente. L'homme, heureusement, s’habitue à souffrir, comme il s’habitue, hélas ! à jouir. Dieu ramène une sorte d'égalité entre le riche et le pauvre par cet effacement de nos facultés. Comme le plus grand bonheur est celui qui est nouveau, il y
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