Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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mes étaient avec elles : elles forcent l’hôtel-de-ville pour y chercher des armes, et, avec un tumulte qu’on ne peut décrire, prennent ce qu’elles trouvent, ramassent des canons, les conduisent, entraînent avec elles toutes les femmes qu’elles rencontrent, se mettent en marche, recrutant toujours à leur manière; et lon ignore quels auraient été leurs caprices tumultueux, si un citoyen, nommé Maillard, ne se fût mis à leur tête pour les corriger, les gouverner, les appaiser, les diriger, avec un talent qui est au-dessus de tout éloge.

Cependant les citoyens aussi voulaient amener le roi à Paris. Rassemblés en armes, ils exprimaient leur vœu de manière à être obéis. Les compagnies du centre, jalouses de garder le roi, y joignaient le sentiment de leur amour-, propre offensé. En vain M. de la Fayette, que semblait étonner cette idée de faire violence au roi, cherche à calmer ces mouvemens : il est menacé lui-même. Il demande un ordre de la commune : on le lui donne, et il part. Nul pinceau ne peut décrire l'ivresse de Paris, voyant défiler ses milices, qui vont chercher ct lui amener son roi. La capitale ne doutait pas que ses peines ne fussent enfin terminées. :

Les femmes, conduites par la faim, s’avancaient à Versailles; et Maillard, qui les gouvernait, les engagea, chose difficile, a ne se présenter qu’en suppliantes à l'assemblée nationale. C'était au moment où l’assemblée insistait encore auprès du roi, où elle attendait l'acceptation tant rétardée des articles constitutionnels. Le roi accorcait son accession avec des remarques, et eu égard, disait-il, aux circonstances alarmantes et aux besoins de l’état. Mais l'assemblée prétendait qu’elle ne devait attendre de lui que son acceptation. On disait que cette accession prétendue avec ses clauses était une vraie protestation ; que les droits des peuples avaient existé avant les rois; que ce refus de les reconnaître devait enfin engager l’assembiée à déchirer le voile religieux qui couvrait cette grande vérité, que lautorité des rois est suspendue quand le souverain donne ses lois.

Maillard s'était chargé de parler pour les femmes, afin de les empêcher de parler elles-mêmes. Son discours eut deux objets; le manque de pain depuis trois jours, et le mépris de la cocarde nationale. Il demande que les gardes= du-corps, qui en portaient encore une blanche, arborent celle de la nation; et, dans ce même instant, on lui porte, de leur part, une cocarde nationale; ce qui fit crier aux femmes : vive le roi et MM. les {gardes-du-corps ! C’est ici le moment de le dire; la plupart de ces militaires avaient