Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

CONSTITUANTE. 67

Au dehors, les brigands s'étaient emparés de deux gardesdu-corps; ils leur coupèrent la tête, malgré les efforts de ceux des gardes nationaux qui arrivaient. Enfin ceux-ci parvinrent à se rendre maîtres de la place, et à disperser les brigands, qui allèrent exercer ailleurs leur pillage, toujours poursuivis ettoujours chassés par la garde nationale. On reprit des chevaux du roi et de ceux des gardes-du-corps qui avaient été volés#Enfin cette bande de scélérats reprit la route de Paris, emportant en signe de victoire les deux têtes des gardes du-corps.

Avec eux disparut toute l'horreur des scènes sanglantes du matin, Alors le caractère national se montra dans toute sa candeur : les soldats parisiens et les gardes du roi s’embrassent ; ceux-ci prêtent le serment militaire : le roi recoit les hommages des gardes nationales qui remplissent ses appartemens, et leur recommande ses gardes.-Il passe à son balcon pour se montrer à son peuple ; il est accueilli par des cris de vive le rot. La reine vient, àsontour, marquer le même empressement et recevoir les mêmes hommages : enfin éclate ce cri, cevœu général des Français, le roi à Paris! Le roi déclare qu’il ira à Paris, à condition que ce sera avec sa femme et ses enfans , et l'ivresse devient générale : officiers, soldats, gardes du roi, gardes nationaux, tous se félicitent et s’embrassent. Les gardes du roi changent de cocarde; ils jettent leurs baudriers aux grenadiers”nationaux; et ceux-ci les recoivent; on change de chapeaux et d'épées; et tout prouve que ce n’étaient pas les gardes nationales de Paris qui en voulaientau gardes-du-corps. L'assemblée nationale, qui avait envoyé au roi une députation pour entourer sa personne, qui, sur le bruit de son départ, avait délibéré qu’elle était inséparable de la personne du roi, lui envoya une nouvelle députation pour lui porter cet arrêté ; et en décréta une troisième pour l'accompagner à Paris, où le roi arriva le soir même, au milieu de ses gardes, marchant avec les gardes nationales. La multitude qui le suivait, pous= sait des cris de joie; et les femmes, persuadées que l’abondance allait renaître etla famine cesser par la présence du roi, prouvaient, par leur langage grossier mais énergique, que c’était là l’objet réel de leur voyage (1). Le roi, arrivé à Paris, promit d’y faire sa demeure la plus habituelle.

Ainsi fut étouffée cette conspiration dont l'objet était d’enpapa, (1) Les femmes criaient au peuple qui venait à la rencontre du roi : « Nous amenons le boulanger, la boulangère et le petit mitron. » Ainsi une famille connue dans la robe porte le nom de Boulanger , parce que, dans une famine elle donna beaucoup de pain au peuple. C'est sa manière de louer.