Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

CONSTITHANTE. gr

que le peuple a été admis à gouverner ses propres affaires, il Va fait avec raison et intelligence. C’est que ce genre même de gouvernement l'appelle à s'instruire de ses intérêts, et qu'il apprend à les connaître quand on ne le force Pas à s'en reposer sur autrui. L’ignorance est le ressort des gouvernemens despotiques; l’universalité des lumières est celui des gouvernemens libres. Pour obéir aux lois des premiers il faut que le peuple ne sache rien; pour obéir aux derniers, il faut qu'il sache tout: mais lorsque tous les despotismes se réunissent pour se soutenir réciproquement et pour avilir le peuple qui les soudoie et les nourrit, la calomnie dont on veut le noircir retombe sur la tyrannie même qui l’insulte. En vain les prêtres disent aux peuples, qu’ils sont abrutis, que la puissance de leurs tyrans est une puissance divine, et qu’il faut baiser la verge dont ils nous frappent : on sait qu'ils ne prèchent cette doctrine que lorsque les tyrans sont leurs amis,

Ainsi la haîne qui s’est manifestée en France contre les ordres privilégiés était fondée sur leur intelligence avec la cour, qui s’efforçait de maintenir le despotisme. Le peuple a vu que ces trois puissances antiques ne se soutenalent réciproquement qué pour lécraser avec plus d'avantage et se nourrir de ses sueurs et de son sang. Mais quand la révolution a été avancée, quand le glaive a été tiré du fourreau , et que les privilégiés ont publié en France et dans toute l’Europe, qu’ils allaienttirer une vengeance éclatante des outrages qu’ilscroyaient avoir reçus, la nation n’a vu en eux que des ennemis déclarés. Les citoyens alarmés se sont représenté les proscriptions affreuses qui tomberaient sur leurs têtes si cette triple alliance l’em-

ortait. Ils ont vu Paris nageant dans le sang et dépeuplé, les échafauds dressés dans toutes les parties du royaume, et les représentans du peuple livrés au fer des bourreaux : ou, si la nation se livrait à l'énergie qu’elle avait développée, ils la voyaient plongée dans toutes les horreurs de la guerre civile, et finir par l'anarchie ou la servitude.

Enfin, quand les privilégiés, ne comptant plus sur leurs forces, parcoururent toutes les cours pour appeler les rois à leur aide, les Français détestèrent la tyrannie davantage. Ils s'étonnaient que sept ou huit hommes ou femmes de l'Europe se crussent en droit d’ensanglanter la France parce qu’ils portaient une couronne. Ils comparaïeut la conduite des rois, à qui tout prétexte est bon pour porter le fer et la flamme chez leurs voisins , à celle d’une nation libre et juste, qui met le respectpour ses voisins au rang de ses premiers devoirs. Ils déploraient le sort des nations soumises à la volonté arbitraire d’un seul homme, toujours disposé à sacrifier des milliers d’hommes comme lui à ses intérêts mal entendus. Mais la noblesse

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