Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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sur-tout leur devenait de plus en‘plus odieuse. Ils regardaient comme des traîtres à la patrie des privilégiés qui, se déshonorant pour reconquérir un faux honneur, ne s’occupaient que des moyens dedéchirer leur pays et de lelivrer aux horreurs de laguerre civile. Ne pouvant croire au désintéressementdes rois, il leur semblait les voir se concerter pour dépecer la France et se la partager. Ils voyaient Louis XVI, ce roi que les bons Francais s’obstinaient à maintenir contre ses prétendus amis, privé peut-être de la couronne et céder la place à des princes qui joueraient un rôle plus éclatant que lui. Ils déploraientson malheur d’être entraîné par des conseils perfides, et de ne pas s’apercevoir que cette conjuration était contre lui; qu’on ne voulait que se servir de son nom pour couvrir des barbaries et le faire régner sur des déserts. Alors la révolution fut justifiée. On s'estima heureux d’être débarrassé de tels maîtres; et leurs menaces et leurs vengeances firent apprécier les bienfaits et les services dont ils se vantaient. On sentit plus que jamais le prix de la liberté; elle devint l’idole de tous les cœurs ; et tous les citoyens furent disposés à vaincre ou mourir pour elle.

L'assemblée nationale, de son côté, n’en sentit que mieux la nécessité de consolider une constitution qui devait préserver la France de toutes les sortes de tyrannie. Elle avait proclamé la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dans un temps où, nétant pas encore suflisamment affermie , elle ignorait si elle aurait celui de poser les lois qui découlent de ces

rincipes, Elle avait donné aux citoyens la connaissance de Eu droits, commeun père malade, et peu sûr de vivre longtemps, remet à son héritier les titres de ses possessions et de ses créances. Ensuite, à mesure que le temps et ses travaux eurent établi et justifié l'autorité du corps constituant, il fixa les droits civils des citoyens; l'égalité des contributions, de l'admission aux emplois, des récompenses et des peines; la liberté des actions, des discours, des écrits, des opinions, des religions et des cultes sous la protection dela loi, qui ne punit que les torts faits à la société on aux individus. Il entoura chaque citoyen de toutes les précautions qui garantissent sa liberté individuelle, et qui le préservent des actes arbitraires, de l'autorité et de la vexation des tyrans subalternes, souvent plus cruels et toujours plus insupportables que leurs chefs.

En adoptant le priacipe de Montesquieu, qu’un peuple ne peut être libre si les divers pouvoirs sont réunis dans une seule main, il plaça le pouvoir législatif dans la réunion du corps des représentans du peuple, qui décrètent , et du roi, qui refuse ou consent ; le pouvoir exécutif dans la main du roi, etle pouvoir judiciaire dans celles des magistrats choisis à temps