Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

CONSTITUANTE. 85

par le peuple. Des juges-de-paix, établis par canton, y termineront les petits différends; des tribunaux, établis par districts, jugeront les causes majeures : il y aura deux degrés de juridiction , et l’on appelera d’un tribunal de district à un autre: un tribunal criminel sera fixé par département, et les citoyens y seront jugés parleurs pairs. Enfin un tribunal de cassation : qui ne jugéra que la violation des formes ou des compétences, couronne l’édifice. Cependant une haute-cour nationale et des jurés jugent les crimes de lèse-nation; des bureaux de conciliation et de famille accommodent les différends ; l'arbitrage ouvert à tous les citoyens est comme le vestibule du palais de la justice, où siége l'humanité pour arrêter et calmer les passions , et la justice est gratuite.

Pour régler l'administration de la chose publique ; l’assemblée nationale statua que le corps-législatif fixerait annuellement les contributions et les dépenses; que le roi, par ses agens, ferait percevoir les unes et rendre compte des autres; que , sous les ordres du roi, une administration par chaque département ferait répartir les contributions et recevoir les deniers, et qu’elle administrerait la chose publique; et que, Sous son inspection, une administration par districtexécuterait les ordres du roi dans son ressort. La police de chaque ville ou communauté fut attribuée à des magistrats populaires choisis par les citoyens,

L'assemblée nationale ayant distribué les pouvoirs en régla les fonctions, l'équilibre et les bornes respectives. Elle organisa une force publique pour la sûreté du dedans et pour se garantir des attaques du dehors. Et quant à ses relations avec ses voisins, en maintenant les alliances existantes, elle déclara qu’elle n’entreprendrait aucune guerre dans un esprit de conquête. Une foule de lois particulières réglèrent tous les détails ‘de ces lois constitutionnelles.

Telle était la constitution que l'assemblée nationale donnait à la France, malgré les oppositions de plusieurs desprivilégiés que ce corps renfermait dans son sein, et les obstacles qui renaissaient chaque jour. Plusieurs se sont attachés à soutenir que cette constitution est vicieuse : mais le prodige, c’est que l'assemblée nationale ait. pu la faire, composé, comme elle

était, de deux partisabsolument opposés dansleursintentions. Telle qu'elle est, le corps constituant , après avoir posé pour principe que la nation est le souverain et que la volonté génétale est la loi, soumit à l'examen des peuples, à l'expérience, à la sagesse et aux besoins des générations suivantes, la constitution qu’il avait faite. Il la garantit à-la-fois et de la précipitation qui se hâte de réformer, et de la paresse qui laisse croître les abus.