Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

CONSTITUANTE. 87

fastueuse était momentanément éclipsée, et Je château de Versailles était abandonné. La multitude des pensionnairestitrés ; qui assiégeaient le trône pour en épuiser le trésor, avait disparu. Des jeunes gens , moitié courtisans et moitié militaires, avaient cédé la place à d’obscurs plébéiens. Il n’y avait plus de pairs, plus de ducs , plus de marquis, plus de comtes ni de barons , et les titres étaient déjà devenus ridicules. i

Les parlemens , ces tuteurs et rivaux des rois , s'étaient évanouis ; on se souvenait à peine de leur existence, quoiqu’on entendît dire quelquefois qu'ils croyaient exister encore. Tous les autres offices de judicature étaient supprimés; et cette nuée d'hommes de loi qui couvraient et dévoraient la France étaient rentrés dans la classe générale des citoyens; leur robe même n’existait plus.

Dans les provinces , les Souverneurs, les commandans , les états-majors , les intendans, les subdélégués, Les présidens et les tribunaux d'élection, avaient été supprimés : des ad= ministrateurs électifs les remplacaient, Il n’y avait plus de maires en titres d'office , Plus d’échevins , de capitouls, de jurats, de consuls: des municipaux électifs avaient pris leur place : le nom seul de maire était resté. Les cours des aides, les chambres des comptes, les trésoriers, les généraux de finance , les chancelleries , les bureaux de finance , avaient également disparu : une comptabilité simple et générale avait été établie sur l’immensité de leurs débris,

Ces vastes corps , connus sous le nom d’états provinciaux, où les priviléges antiques des provinces réunies à lempire étaient devenus le patrimoine d’un petit nombre d'individus : s’étaient fondus dans l'unité nationale. Il n’y avait plus de provinces ; leurs noms mêmes avaient été sacrifiés comme un préjugé : ils sont déjà oubliés , et nos enfans ne les étudierontque dans l’histoire. L'Atlas de la France était devenu inutile, et sa géographie était changée. A la bigarrure confuse des bailliages, des sénéchaussées, des élections, des généralités, des diocèses, des ressorts des parlemens , des gouvernemens militaires, et de tant d’enclaves bizarres qu'avait successivement entassées le chaos des droits , des priviléges, des langues, des coutumes, des peuples et des conquêtes ; à cette confusion, dont l'étude seule était une vaste science , avait succédé une division simple et uniforme. La France était le royaume aux quatre-vingt-trois départemens; et la Corse elle-même, sé. parée par sa langue et par la mer, semblait se rapprocher de l'empire pour S’incorporer avec lui.

Dans l’église, un système également simple avait porté à diminuer le nombre des évêchés, dont l'étendue était d’ailleurs inégale :il y en eut un Par département. Les paroisses inutiles