Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

G2 CONVENTION

silence ou leurs murmures. À chaque instant de nouveaux corps l’abandonnaïent ; tous ses ordres étaient mal rendus et mal exécutés; on eût dit que lui-même il ne faisait plus qu'une vaine ostentation de constance dans une entreprise dont il n’espérait plus et cherchait à peine le succès. Le dernier trait de sa disgrace fut la disparition du trésor de l’armée. Un corps de chasseurs, chargé de le transférer, le conduisit à Valenciennes ,; pour le remettre aux commissaires de la convention ; il contenait deux millions en noméraire. Dumouriez se trouva bientôt sans armée. Le prince de Cobourg le reçut, lui, le due de Chartres, et tous ceux des généraux et officiers français que l'indignation, ou leur aveugle dévouement à leur chef, avaient engagés dans cette entreprise. Quelques escadrons de hussards passèrent encore à l'ennemi.

L'armée française vint se réunir sous les ordres du général Dampierre , qui était déterminé à défendre sa patrie, quels que fussent ses chefs et ses discordes. Il entra peutêtre sans ambition dans le rôle le plus périlleux. Deux torts l'assuraient déjà de l’ingratitude de ceux pour lesquels il se dévouait; une naissance illustre et un cœur trop plein d'honneur et d'humanité pour ne pas irriter les jacobins. Il rallia avec zèle cette armée en désordre. Avant même d’avoir pu rétablir la discipline parmi les soldats, il chercha les occasions d'exercer leur valeur. Il fit deux vaines tentatives pour débloquer Condé. Il périt dans une action, par une témérité qui allait au-delà des devoirs d’un général. Plusieurs personnes ont pensé que, placé bientôt dans l’alternative d’être ou l’esclave ou la victime des jacobins, il chercha une mort certaine.

Le prince de Saxe-Cobourg vit avec un flegme étonnant s'échapper une occasion que la fortune n’eût pas vainement offerte à un homme de génie. Il demeura passif quand Dumouriez agissait, passif encore quand Dumouriez était en péril. Il ne songea pas même à poursuivre ces bataillons qui fuyaient épars, sans chefs et sans direction. Pour excuser son inaction , il allégua la trève qu’il avait signée; mais les conditions secrètes de cette trève lui imposaient le devoir de seconder Dumouriez avec ardeur. L'Antriche , pendant une guerre si longue , ne vit jamais un seul homme d’état parmi ses généraux. Le prince de Cobourg attendit, pour attaquer les Francais, que ceux-ci fussent revenus de leur étonnement.

On se fait assez l'image des embarras et des fureurs qu’un tel événement dut répandre dans la convention. Puisque nous touchons au moment où elle va laisser établir au-