Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

NATIONALE. 75

cette résolution fut la sienne. Quelques-uns V’imitèrent, d’autres restèrent cachés à Paris, déterminés à en sortir dès le lendemain pour aller provoquer l'insurrection des départemens. Déjà la convention est captive dans son enceinte; mais elle l'ignore. Henriot laisse filer à travers les rangs des pétitionnaires. Livrez au peuple, disent-ils , les députés traîtres et conspirateurs. « Etait-ce donc en vain, s’écrie Lanjuinais, que » nous Vous annoncions les complots d’une commune usurpa» trice? Eh bien, maintenant, livrez donc à cette commune » vos collégues, votre autorité, votre honneur! Fléchissez » Sous ces nouveaux tyrans, vous qui avez refusé l’occasion » de les punir; ou plutôt imitez-nous, nous que leurs coups » menacent de plus près! attendez et bravez leurs fureurs! » Vous pouvez me faire tomber sous leur couteau, mais non » pas à leurs pieds. »

Le courage d’un homme soutient la convention; elle rejette la pétition homicide par un ordre du jour.

Les tribunes, les pétitionnaires poursuivent de leurs imprécations la majorité, qui, après avoir bravé l'orage, voudrait déjä s’y soustraire. Toute délibération est interrompue pendant deux heures de tumulte. Plusieurs députés ont cherché : et n'ont pu trouver une issue pour fuir ; par-tount des brigands armés les ont repoussés. On rentre; un calme lugubre succède à l'agitation. Barrère est à la tribune; il propose, au nom d’un comité, que les députés accusés soient suspendus de leurs pouvoirs. Ces mots, quoiqu'ils parussent adoucir la proscription, devaient affecter les girondins d’un sentiment cruel. Quand Louis vint en suppliant, et resta comme captif au sein de l'assemblée législative ; quand son château était foudroyé, ses défenseurs immolés, il ne fut aussi que suspendu de son autorité. Barrère avait demandé aux girondins des démissions volontaires. Plusieurs étaient absens, quatre se soumettent, Barbaroux résiste. « Vous le voyez, dit-il à ses enne» mis, je ne fais point à votre haîne le sacrifice de mes devoirs, » de mon honneur. Auriez-vous la générosité de vous con» tenter d’une seule victime? elle s'offre à vous ; versez mon » Sang, et puissiez-vous vous borner à cet attentat! » Il ne peut continuer; il est arraché de la tribune. Lanjuinais s’y précipite. Legendre, alors fanatique sectateur de Danton , et même de Marat; Legendre , qui depuis ouvrit son cœur à des sentimens humains et généreux, eut la brutalité féroce de porter les mains sur Lanjuinais, de le renverser. Il n’a pu altérer le courage ni même la sérénité de cet homme de bien. Lanjuinais fait encore entendre sa voix. Les anciens, dit-il, quand ils Préparaient un sacrifice, couronnaient la victime de fleurs et