Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

td . CONVENTION

ses bureaux. Maïr Roland, servir la commune de Paris, c'é= taient-là les seuls titres demandés.

Ce ministre contribua beaucoup à développer un cynisme tel qu’on pouvait l’attendre d'hommes qui,après avoir profané les mots patriotes et républicains , ne rougissaient pas de s’appeler sans-culottes.

Mme Roland , au contraire, fixait encore auprès d'elle, non pas les derniers restes de cette politesse et de cette élégance de mœurs qui avaient caractérisé les Français dans des jours si différens, et qui n’existaient plus que dans d’obscures retraiLes , mais au moins les restes de la décence publique. Les girondins les plus distingués par leur caractère ou leurs talens composaient sa société, Peu de femmes surent mieux qu’elle conserver une dignité, une retenue difficile pour ce sexe dans les relations politiques. Elle avait pour les hommes de son parti le culte de l’amitié; les sentimens qu'elle leur inspirait ne parurent point exciter parmi eux de rivalité: elle aimait à écrire : elle écrivaitéloquemment ; elle mit beaucoup d’activité à former un esprit public opposé à l’atroce licence qui s’étendait tous les jours. Les missives qu’elle adressait, sous le nom de son mari, aux départemens, avaient excité dans plusieurs un vif enthousiasme. Quelques-uns des girondins étaient portés à se dissimuler leurs dangers; Mme Roland réveillait leurs sollicitudes ; c'était toujours elle qui proposait les partis les plus courageux, qui les suivait avec le plus de constance. Les jacobins s’indignaient d’être arrêtés dans tous leurs complots par une femme ; ils ne manquaient pas de répéter à la convention qu'il était honteux que Mme Roland prit sur les destinées de la France,le même empire qu’elle avait sur l'esprit de son mari. Beaucoup de députés, qui alliaient la peur à la rudesse, reprochaient aux girondins d'écouter une femme qui leur donnait des conseils courageux.

Les jacobins eurent une joie prématurée ; ils crurent avoir trouvé une occasion de perdre Mme Roland. Un dénonciateur se présenta contre elle; mais son habileté ne répondit pas àson impudence : Chabot, avec qui il s’était concerté, l’introduisit devant la convention, et prépara les esprits à la découverte du plus affreux complot. L’accusation était grave , en effet; il ne s'agissait de rien moins que d’une correspondance entretenue par MmeRolandavec le ministère britannique. Ellefutmandée à la barre pour être confrontée avec son accusateur. Elle parut avec l’air le plus serein. Elle confondit le calomniateur par des Auestions imprévues ; elle le fitse contredire , et presque se rétracter. Les jacobins s’efforçaient en vain de soutenir la contehance de leur stupide agent; tout ce qu’ils faisaient pour aider les associait à sa confusion.