Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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publiques anciennes, la politique les invitait à résister à leur penchant. Ils ne désespéraient pas que Dumouriez ne pût chercher son appui auprès de leur faction , et leur prêter le sien: ils lattendaient d’un air froid et menaçant ; ils lui montraient cette alternative, ou l’échafaud, ou leur alliance.

Dumouriez affecta, autant qu’il put, la neutralité entre les deux partis de laconvention; il vit sans affectation lesgirondins, et parut à la société des jacobins, qu’il détestait, et où il n’était aimé de personne. Ce fut un jour de fête pour cesderniers; ils voulaient, non célébrer, mais enchaîner un triomphateur. Dumouriez parla de lui-même et de ses services avec modestie ; il s’expliqua avec beaucoup d’assurance sur l'avenir: il partait pour la Belgique ; il présentait la Belgique comme déjà conquise. Les jacobins en reçurent l'hommage avec quelque satisfaction. Collot-d’'Herbois se rendit leur interprète; il fit connaître au général, dans un long discours, qu’il était bien de soumettre les Belges, mais mieux d’accabler les girondins; il l'invitait à terminer promptement la première opération, pour venir concourir à la seconde. Ce discours, quelquefois flatteur, quelquefois menaçant, se terminait par la plus ridicule affectation de ce que les jacobins appelaient la simplicité républicaine. Collot-d'Herbois promettait un baiser de sa femme au vainqueur. Dumouriez sortit humilié de cette séances mais il sentit la nécessité de s’attacher quelques chefs des jacobins:iljeta, avec discernement, ses vues sur Danton, sur Lacroix. Il acheta leur appui en offrant à leur cupidité une belle perspective dans la Belgique.

I partit; on lui avait moins donné le moyen que présenté la nécessité de vaincre, L'armée qu’il commandait était nombreuse; mais c'était celle qu’il n'avait osé opposer aux Prussiens fugitifs, malades et exténués. Il fit l'épreuve de l'extrême promptitude avec laquelle les soldats français recoivent la première instruction militaire. Les besoins auxquelsses troupes étaient soumises irritaientleurardeur de combattre.Le général avait soin de leur représenter, d’un côté, la disette qui s’ap-

rochait d’eux, et, de l’autre, des champs fertiles à conquérir.

L'activité de ses préparatifs avait été telle, qu’un corps de

uinze mille Autrichiens, qui, sous les ordres du général Clairfait, avait secondé les opérations du duc de Brunswick dans la Champagne, n'avait pu encore arriver au secours de la Belgique menacée. Le duc de Saxe-Teschen commandait l’armée destinée à la couvrir; il venait de recevoir quelques renforts, parmi lesquels étaienttrois régimens d’émigrés. Ceprince, peu appelé aux grandes entreprises, toujours indécis, embarrassé, éteignait l’ardeur des soldats à force de précautions. Le général Beaulieu, qui commandait sous lui, était plus exercé