À la recherche de la fortune du duc d'Orléans (1793-1794) : lettres inédites du général Montesquiou à Francis d'Ivernois

A LA RECHERCHE DE LA FORTUNE DU DUC D'ORLÉANS ll

Tel me paraît être, Monsieur, le tableau fidèle de cette affaire. Elle me semble digne de vous intéresser. Les calamités politiques ne vous sont pas étrangères, et vous savez mieux qu'un autre combien elles amènent d’injustices et de vexations. Celui qui en a éprouvé pour son propre compte, doit se porter avec plaisir à en préserver d’autres.

Quelques succès que M. le Duc d'Orléans puisse espérer de sa juste réclamation, ce ne sont que quelques débris d’un grand palais, que le véritable propriétaire cherche laborieusement à ramasser pour s’en construire une chaumière. S'il devait échouer dans cette entreprise, il serait réduit pour vivre au travail de ses mains, et sa malheureuse sœur est plus à plaindre, s’il est possible, en raison de son âge et de son sexe. Pour moi qui étais entièrement étranger à ces enfants, moi qui — comme vous le savez — suis victime des services même que j'ai cherché à rendre à ma Patrie, j'oublie mes malheurs quand je suis témoin des leurs; et je ne me crois plus en droit de me plaindre, lorsque je vois le petit-fils d'Henri IV, un enfant digne de cette auguste origine, proscrit, persécuté, privé du plus strict nécessaire, et d'autant plus malheureux que la carrière qu’il a à parcourir est plus longue.

Au moyen des indications que je peux vous donner, je crois qu'il ne vous sera pas difficile de remonter à la source des différents dépôts que feu M. le Duc d'Orléans a faits en Angleterre, d’en constater les valeurs, et de prévenir l'abus que les dépositaires pourraient être tentés d’en faire. J’aperçois un danger auquel il est important de parer. Les papiers de M. le Duc d'Orléans, saisis à Paris, ont fort bien pu mettre entre les mains de quelques membres des comités de la Convention les titres de ses propriétés anglaises; ceux-ci peuvent en avoir trafiqué, et peut-être même quelque dépositaire infidèle aurait pu négocier la remise de ces pièces. Voilà ce qui rend im-