Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

356 CORRESPONDANCE DÉ THOMAS LINDET

La faction autrichienne est toujours redoutable : elle sait parer tous les coups. Elle a paralysé l’armée, elle sauvera tous les perturbateurs intérieurs. Les gardes licenciés sont consolés, les prêtres bannis sont conservés, les armées étrangères approchent. Tout le monde voit une trahison. Le nombre et la qualité des traîtres effraient. Les dénonciations échouent : on aime mieux affecter de n’y pas croire,que de prendre de grands moyens. La HauteCour nationale suit le régime expectant. C’est à la nature à terminer cette crise. L'Assemblée nationale enveloppera-t-elle Paris d’une armée de gardes nationales des départements? Cette idée est bonne, mais il vaudrait mieux expulser les traîtres, en les congédiant avec précaution, pour éviter leur rassemblement sur les routes.

Nous sommes menacés de nouveaux troubles : il est impossible qu’il n’y ait pas quelque désordre à leur occasion. Le blé renchérit, les laboureurs eux-mêmes sont effrayés d’être pris au mot, quelque prix qu’ils demandent. … Hier, la municipalité, le district et le département ont assisté à la procession avec toute la garde nationale.

Le tribunal criminel seul n’y a pas pris part. M. Buzot veut bien fraterniser avec nous, dans les fêtes civiques, ainsi qu’il l’a écrit en réponse aux invitations qui ont été faites par mon conseil, en mon absence.

CCXXIII, — Au même. Évreux, Le I5 juin 1792.

Mon frère, il paraît qu’on se familiarise avec l’idée de 20,000 hommes aux environs de Paris. Les processions reçoivent une vive attaque. Voilà encore un nouveau ministre. M. Servan, M. Roland valaient, je crois, mieux que Dumouriez et Noaïlles. Dumouriez aura de la peine à faire croire qu'il est autre chose qu’un intrigant ; Dieu nous garde qu'il soit un traître! Clavière a été maltraité