Étude sur les idées politiques de Mirabeau

12 F. DECRUE.

Ôtent toute incertitude à cet égard; enfin, à la tribune même, Mirabeau, ayant à défendre un de ses amis, déclara qu'il se faisait aider de lui dans ses travaux.

Ses collaborateurs, surtout en 1789, étaient pour la plupart des Genevois, bannis de leur république à la suite d’une guerre civile (1782). Appartenant à l'opinion libérale, ils avaient trouvé un refuge en Angleterre d’abord, puis en France, au moment de la Révolution. Ils eurent ainsi l’occasion de développer leurs connaissances politiques en assistant aux débats parlementaires de l’un et de l’autre pays.

Le plus remarquable d’entre eux est Etienne Dumont. Né à Genève en 1759, il commença par exercer dans sa ville natale le ministère évangélique. Ses opinions le firent exiler par l’aristocratie, sortie victorieuse des troubles politiques qui agitèrent la petite république pendant le xvnr siècle. Après un séjour de deux ans à Saint-Pétersbourg (1783-1785), il se rendit à Londres où il devint précepteur des enfants de lord Shelburn, plus tard marquis de Landsdowne. Pendant un voyage qu’il fit à Paris en 1788, il fut présenté au comte de Mirabeau par un ami commun, sir Samuel Romilly. Il revint en France au moment de la Révolution, renoua ses relations avec Mirabeau et l’aida dans ses ouvrages. Cette collaboration fut assez connue pour que Dumont, effrayé des pamphlets qu’elle provoqua, dût l’interrompre et se retirer en Angleterre.

Lié avec Bentham, il s’appliqua dès lors à propager les théories de cet illustre économiste. Il ne rentra à Genève qu’en 1814 et mourut en 1829 pendant un voyage qu'il faisait en Italie. C'était un honnête homme, instruit et intelligent. Mirabeau le chargeait spécialement de composer les adresses que l’Assemblée présentait au roi et au peuple. Ce genre d'ouvrages déclamatoires convenait au style pompeux de l’ancien prédicateur?.

Dumont était secondé dans sa tâche par son compatriote Du Roveray. Ce personnage, qui avait été un moment procureur général de la République (1779-1780), se réfugia en Angleterre après les luttes civiles de Genève. En 1789, il vint avec

1. Discours du 11 juin 1789 dans le Moniteur.

2, Notice sur Dumont par J.-L. Duval, placée en tête des Souvenirs de Dumont sur Mirabeau. Cf. sur Dumont les articles de Candolle, dans la Bibliothèque universelle de novembre 1829, et de Sismondi, dans la Revue encyclopédique, t. XLIV, p. 258.