Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

LE VICOMTE DE NOAILLES 23

Pendant la triste année 1790, alors que l’Assemblée nationale achève de raser l'ancienne France, sans arriver à en reconstituer d'un seul jet une nouvelle, Noailles assiste aux grandes discussions d'où est sortie l’organisation de la société moderne ; il n’y prend point une part prépondérante. Ni la division territoriale du pays, ni les lois de finances, ni le mode de l'électorat, ni l’organisation judiciaire ne le passionnent. Il ne se pose pas en administrateur, encore moins en financier. Noailles est un libéral et un soldat, il ne veut être que cela. Il monte la garde autourde l'égalité démocratique et à la porte des casernes. Cest la spécialité qu’il revendique. D'ailleurs, « quoiqu'il parle bien dans un salon, il n’a pas l’éloquence de la tribune (1). »

S'agit-il de mettre la conscience des représentants à l'abri des corruptions du pouvoir? Il envoie le duc de Biron, son ami, déclarer au nom de la noblesse libérale qu'elle renonce à toute charge publique pendant l'exercice du mandat de député (20 janvier 1790). Le même homme ne peut pas représenter le roiet le peuple dans des intérêts parfois opposés.

Les juifs réclament-ils la jouissance des droits de citoyens « actifs »? Noailles prend parti contre l’abbé Maury, lequel entend ne les leur concéder que « pro: visoirement ». [lest l'adversaire de tous les privilèges, sociaux ou politiques. À cent ans de distance, ce ne sera pas sans surprise que les gentilshommes d’aujourd'hui apprendront que les juifs doivent à un

(1) Mémoires de Tilly, À I, p. 297.