Histoire de la théophilanthropie : étude historique et critique : suivi d'une notice sur les catholiques allemands

DE LA THÉOPHILANTHROPIE. | 79 les lois générales qu'il a établies une fois pour toutes, et dont l’action régulière le dispense de tout souci par rapport à la eréation. IL est clair que cette conception de Dieu est mortelle à la vie religieuse. Dès le moment que nous ne pouvons pas connaître Dieu, nous pouvons encore moins soutenir des rapports personnels avec lui, et s’il ne s’oceupe pas du monde, s’il en estnonseulement distinct, mais séparé, si ce que nous appelons Providence n’est que l’action régulière de lois générales et fatales, il peut y avoir encore place dans notre cœur pour l’adoration, pour la crainte, mais il n’y en apas pour la prière, la bénédiction, l'amour, la confiance, la repentance, tous ces sentiments, tous ces actes dont se compose la communion de l'homme avec Dieu.

Aussi, si le Déisme laisse debout la moralité, qu’il prive pourtant d’un précieux appui, il est négatif de la piété qu'il atteint dans son principe même. Une société religieuse fondée sur le Déisme se conçoit à peine, et si elle se fonde, on peut être certain d’une chose, c'est qu’elle ne fera que végéter, languir et mourir.

Entre le Déisme dont nous venons d’esquisser les principaux traits, et dont Voltaire, en France, peut être regardé comme le représentant le plus illustre, et le christianisme, vient se placer un autre système, le Théisme, dont un écrivain non moins illustre que Voltaire, J.-J. Rousseau, a été l’apôtre éloquent et passionné.

Tandis que le Déisme de Voltaire s’élève à l’idée de Dieu d'une manière médiate, par la double idée de cause et de fin, le Théisme de Rousseau prétend atteindre Dieu immédiatement, par le sentiment, par une aperception directe du cœur. Le Déiste dit : Le monde existe, il révèle un plan, un but, done Dieu existe ! Substituant à la réalité extérieure le fait de conscience, le Théiste dit : Je sens Dieu, donc Dieu existe! c'est-à-dire que le Théisme remplace le raisonnement par le sentiment.

Mais, malgré la différence de leurs points de départ, les deux systèmes ne tardent pas à se rejoindre. Comme Voltaire, Roussean affirme l’incompréhensibilité de Dieu; comme Voltaire, il soutient que c’est folie, témérité coupable à l'homme de chercher