La Serbie
avec les Allemands. Cette hypothèse, théoriquement, n'est pas exclue non plus, par rapport aux Sudslaves, quoique pratiquement elle peut être considérée come irréalisable. Les Serbes sont à l'abri absolu d'une telle combinaison. Nous considérons comme très dangereuse
l'illusion de certains milieux alliés que pour arracher définitivement l'Italie à l'influence germanique, il faudra la satisfaire dans l'Adriatique dans la plus grande mesure possible. Il nous semble en effet qu'une telle politique pousserait plutôt l'Italie dans la voie contraire. Nous avons enregistré dans le n° 7 de « La Serbie » un article significatif du « Corriere della Sera » protestant contre les prétentions
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tertitoriales slovènes qui empêcheraient les communications de l'Italie avec le monde germanique. Les délégués italiens à Paris sont également préoccupés de ces communications, ce qui est également très caractéristique. ” 4 La question adriatique demande une solution équitable pour les deux peuples, slave er italien. 11 faut les satisfaire tous les deux ax même lilre, qui est celui de la nationalité: Dans les régions mixtes, des transactions, dans les régions ayant une population ethniquement compacte, application du principe des nationalités. C'est le seul moyen d'exclure l'Allemagne de Trieste et de l’Adriatique, qüi ne sont que les portes d'entrée pour la Médi-
-L. M. *
terranée.
UN ENTRETIEN AVEC M. VENIZÉLOS
Le grand Crétois, ami de la Serbie
Le 7 mars, je me suis rendu à l'hôte! Mercédés, siège de la délégation hellénique, pour me rencontrer avec M. Venizélos. Son Excellence m'accueillit avec sa bonne grâce habituelle et voulut bien se rappeler les divers articles parus dans la Serbie où j'ai parlé de la question hellénique.
C'est en 1913 que, pour la première {ois, j'eus l'honneur de causer avec M. Venizélos. Je fus frappé par le charme intime et doux de sa parole, par la souplesse extraordinaire de son esprit clair et logique ainsi que par la sûreté de son jugement, et encore par une franchise peu habituelle aux hommes politiques qui sont au pouvoir. Chacune de ses paroles porte l’empreinte de la droiture de son caractère et d'une belle âme. Tant de qualités ne manquent pas de continuer à lui valoir la sympathie et l'admiration de ceux qui l'approchent. — « Votre Excellence, lui dis-je, m'a fait l'honneur déjà de me recevoir lors du Congrès de Bucarest. Alors, vous aviez créé en dix jours un chef-d'œuvre politique.
Avec M Paâchitéh et Täke Jonesco, vous
aviez refait l'alliance balkanique sur une base nouvelle, Aujourd'hui, les affaires ne semblent pas marcher aussi vite ni aussi bien ».
— « L'initiative nous appartenait alors », répliqua le président.
— « Votre Excellence est un des principaux créateurs de l'acte de Bucarest où se manitesta la solidarité des trois Etats balkaniques. Monsieur le Président me permettra-t-il de l’entretenir à ce sujet et de lui demander quelles sont les raisons qui ont empêché les trois Etats alliés de se présenter à la Conférence en un seul bloc, et qui les ont amenés à y siéger séparément, ce qui, à notre avis fut une faute ? »
— «Pour moi, répondit M. Venizélos, j'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour écarter du chemin les difficultés et
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main dans la question du Banat. J'estime en effet que celle-ci aurait dû passer au second plan et qu’on aurait obtenu davantage par des concessions réciproques et un accord, car nous aurions pu alors nous présenier ensemble à la Conférence. Malheureusement mes efforts n’ont pas abouti. Aujourd'hui encore certaines puissances pratiquent une politique aux vues étroites qui rend un accord difficile. Mais s'il n'a pas été possible de s’entendre avant que la Conférence ait décidé du sort des régions contestées, il est d'une nécessilé absolue qu'au moins un accord intervienne au léudemain de la Conférence. Mon avis est donc que, quelle que soit la décision de la Conférence, les deux parties l’acceptent loyaz lement et la considèrent comme définitive.
Là-dessus, M. Venizélos se mit à parler des excellents rapports qui existent entre la Grèce et la Serbie et qui pourraient ser: vir d'exemple comme relations de bon voi: sinage. Il insista snr l'accord que les deux pays voisins conclurent en 1913, grâce aux, concessions réciproques qu’ils se firent. 4.
Je saisis aussitôt cette occasion de def mander à mon éminent interlocuteur ce qu’il en était des bruits répandus dernièrement dans la presse au sujet de rectification de frontière serbo grecque réclamée par la Grèce.
— J'ai déjà fait parvenir à votre gouvernement, me dit M. Venizélos, un démenii catégorique, en l’assurant que. la Grèce ne songeait nullement à demander quoi que ce soit du côté de la Serbie. Île n'ai pas voulu faire une demande semblable er 1915 — alors qu’elle eût paru beaucouÿ: plus naturelle -- c'est-à-dire lorsque i4 Serbie réclama notre secours. À ce moment-là, sans présumer en rien d'une victoire qui aurait permis à la Grèce de réa: liser ses aspirations, j'exigeai de mon pays d'entrer en guerre pour faire honneur à s4
\ | concilier les points de vue serbe et rou
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signature. Je suis partisan de l'union Î1 plus étroite entre nos deux pays qui, dorénavant, doivent marcher ensemble. Aussi faut-il resserrer chaque jour davantage les liens existant, en établissant entre nous de nouvelles relations économiques, financières et intellectuelles. 11 faut faire dans ce sens une active propagande dans les deux pays et créer des conditions favorables à la réalisation d’une union postale, de transports et, un jour même, d'une union douanière. Îl faut institner des commissions pour l'étude de toutes ces questions et l'élaboration de projets.
Je demandai à ce propos à M. Venizélos ce qu'il pensait de l'idée de la création d'un ou de plusieurs établissements de crédit par les banques helléniques dans les principaux centres de notre nouvel Etat.
Son Excellence répondit que cette idée
2m mme rer NRA
lui paraissait heureuse et réalisable.
Je {à questionnai également sur la possibilité du ravitailfément de notre royaume par la flotte marchande hellénique. M. Venizclos me fit alors l'exposé de la situation navale de la Grèce.
Notre tonnage, dit-il, qui, en 1917, était de 860,000 tonnes, se trouve réduit, du fait de la guerre, à 200,000 tonnes. Encore s'il était à nous, nous serions à même de vous secourir, mais la plus grande partie en x été réquisitionnée pour les besoins des Alliés. Il ne nous reste que 60,000 tonnes qui suflisent à peine au ravitaillement de la Grèce.
J'en vins à la question de l'existence dun accord entre l'Italie et la Grèce pour une action commune à la Conférence, accord dont il a été fait mention il y a quetques semaines dans la presse. M. Venizélos m'affirma qu'un tel accord n'existe pas et qu'il avait immédiatement démenti cette nouvelle lancée par la voie de Stockholm. Notre conversation porta ensuite sur les revendications helléniques. Très modérées et très légitimes, ces revendications ne dissimulent aucune visée de conquête sur des terres étrangères. En Epire, notamment, la Grèce ne réclame que les régions s'étendant jusqu'au fleuve IChimara,; "a pen” près à 30 km. au sud du promontoire qui couvre Valona. La ville d’Argyrocastro y est comprise.
On sait que ia partie de l’Epire du Nord réclamée par la Grèce comprend une population d'environ 200,000 habitants, dont 120,000 Grecs et 80,000 Albanais inextricablement mêlés et qu'il serait impossible de séparer géographiquement pour les incorporer, les premiers, à l'Etat grec, les seconds à l'Etat albanais.
La Grèce déclare que cette population mixte doit nécessairement lui revenir, car il serait contraire à toute équité de soumettre une majorité de civilisation supérieure à une minorité de civilisation infé-
| rieure. Elle doit revenir à la Grèce d’au-
tant plus que l’Albanie ne saurait vivre
comme Etat indépendant ni sans tutelle |
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Lundi 17 Mars 1919
étrangère. La conscience nationale de ces régions est très éveillée et son attachement à l’hellénisme ne fait pas de doute. Après les guerres balkaniques, l'Epire du Nord ayant été eugiobée, en vertu du protocole de Fiorence, dans l'Etat albanais et la Grèce ayant retiré ses troupes, les habitants formèrent un gouvernement provisoire et refusérent de se soumettre à l’administration albanaise. |
D'ailleurs il a été stipulé, lors de l'oceupation de Valona par l'Italie, que dans le cas où celte occupation deviendrait définitive, celle de l’Epire du Nord par la Grèce lé deviendrait également.
M.-D. Mariucovitch.
La Conférence de la paix
Quatrième lettre
Malgré le départ du président Wilon, les travaux de la Conférence dé la paix n'ont subi
aucun ralentissement. La dernière semaine fut particulièrement intéressante pour notre peuple, car la Conférence s'est occupée officiellement et officieusement, de nos revendications nationales.
Ce fut d’abord la proposition d'arbitrage. Par cette proposition, la délégation du Royaume sorbo-croate-slovène voulait faciliter la tâche de ja Conférence en laissant à un juge impartial el désintéressé, le soin de trancher la question diffcile dela délimitation italo-slave. Maïs la proposition serbe a rencontré la plus vive résistance auprès de la délégation italienne et pour faire plaisir à l'Italie, la presse française, en sa majorité, s'est prononcée, elle aussi, contre ce moyen amical de résoudre le problème. Il est vrai que nous avions fait preuve d'une maladresse inexcusable dans la manière dont nous avions amené cette question. Nous n'avions pas préparé l'opinion, Et une fois notre proposition faite, nous n'avons pas éclairé le public sur sa portée exacte et son sens véritable,
D'autre part, la censure française, pour des raisons incompréhensibles, avait arrêté les lettres adressées par notre délégation à MM. Wilson et Clemenceau, de sorte que la proposition de l'arbitrage à été rendue publique alors que M. Wilson s'était déjà embarqué pour l'Amérique. La lettre à M. Wilson n'a pas été publiée jusqu'à présent,
ÂAprès le départ de M. Wilson, le bureau de la Conférence communiqua à la presse la proposition serbe et décida, contrairement aux dispositions prises précédemment, de procéder immédiatement à l'examen des revendications sudsla-
vesrEt, effectivement, la délégation serbe reçut,
ke lundi 17 février, une invitation à se présenter l: lendemain, mardi, à trois heures de l'aprèsmidi, devant le Conseil des dix. L'invitation ne portait aucune mention relative à l'objet de la convocation. Toutes les suppositions étaient permises, On pensait cependant que la proposition ne se rapportait qu'à la proposition d'arbitrage. Toutefois, les délégués se préparèrent, à tout, hasard, à faire un exposé global des revendications serbo-croato-slovènes. Après avoir pris connaissance de la lettre adressée par MM. Paëié Trumbié et Vesnié à M. Clemenceau, le Conseil des cinq grandes puissances entendit d'abord M. Sonnino seul, qui se leva pour déclarer, au nom de l’italie, qu'il n'acecptait pas larbitrage. Le texte de la déclaration de M. Sonnino n'a pas élé publié. Aussi ne sait-on pas exactement les raisons par lesquelles les Italiens ont tenté de justifier leur refus de se soumettre à un arbitrage, Si l'on compare les diverses versions données par la presse française, l'Ilalie aurait avancé deux motifs, l'un purement formel, destiné à cacher la cause réelle, l'autre essentiel et qui est irès clair, La raison formelle des Italiens, c’est
ren Sn
FEUILLETON
propre passé et à se persuader que, depuis dongliemps, il a grossi |
LES LIVRES
der deufschen AIntelligenz. (Berne, 927 p., 10 francs).
Huco BALL: Zur Krilik Der Freie Verlag, 1919,
je regrette que, dans les circonstances ‘actuelles, « La Serbie »
ne dispose pas d'assez d'espace pour me permetire de parler die !
ce livre autant qu'il le mérite; mais je im hâte d’ajouif” que même le compte-rendu Le plus Jélailé ne saurait remplacer la lectue de l'ouvrage liui-même, Car c'est un dire que dkewraiïent lire et méditer tous ceux qui possèdent l'allemand, et qu’il faudrait traduire en d'autres langues. I nous montre ce mobile collectif qui à poussé peuple jadis grand et a infligé de si horribles blessures au nrondie tout enlier. . Le volume est dédié « aux guides de la trévolutiom morao ». D'après la préface, son but est d'étendre la question des culpabilités de cetto guerre à l'idéologie des castes et des classes qui ni rendu possible ces gouvernements centraux qui, eux, ont pou:sé à Ja guerre. « L'idée de l'Etat allemand a détruit la pensée allemande, » C'est donc contré tout ce qui a développé kette idée
. de l'Etat allemand que sont dirigées les accusations de l'auteur,
L'introduction qui traite «des principes dun parti intellectuel : liberté et sanctilication », précède ces chapires: 1. Thomas Münzer contre Martin Luther, 2. La philosæphie protestante ot les idées de liberlé de la Révolution Française. 3. Franz von Baader et la venaissonce chrétienne, em ramce et en Russie, et 4 La conspiralion germanorjuive pour la destruction de la morale. . a voluine se termine par d'aboniantes ammioltations jet ‘un ndex. ;
M. Ball est profondément convaineu que seule une denaissance morale peut relever le peuple allemand et que cetis renais-
3 Labîme untphiologie, et Luther est un défaitiste de 4a mifrale. Avant de
sance doil commencer par une franche cohfession «de la cubabité] allemande dans cette guerre. Pour conjduive Son peuple wur le chemin du repentir, il l’enpgage à examiner sans préjugés 6om
de façon tendancieuse la valeur de ceux de ses hommes célèbres:
Îqui l'invilaient à affirmer brutalement ses instincts égoïsies, tandis
qu'il a relégué au second plan ceux qui voulurent ke vivifien: | par l'Esprit. Ceux-ci furent oubliés ou, ee qui fevient au même, condamnés à une survivance purement nominale dans de vicux bougins el sur les rayons des grandes biblio“hèques, sans. qu'ils eussenf aucune influence sur la vie; ccuxà, au coniraire, étaient adorés tous lés jours. Et lés Allemands inc $e contentaient pas dei subir eux-mêmes le joug de ces tyrans spirituels ; ils s’efforçaient de l'imposer à l'humanité. tout entière. | Da là, ‘'isolcment moral de l'Allemagne moderne, isolement dont. M. Ball voil les origines dans Luther et le luthéranisme. Le protestafnlisme pllemand, le luthéranisme, ce n’est pas une religion, dit M. Ball, c'est ‘une
Concile de Worms, il gagne nor, sympathies, comme, avant Marengo, Napoléon gagna celles de ses coutemporains les plus épris de liberté ; mais après Worms, Luther devient l'ennemi, du peuple, l'organe du! syndicau des princes allemands. '
M. Bali l'écrase sous nos yeux en nous dépeignant son vomllit | avec Thomas Münzer. Le port que l’auteur nous trace de coluici rappelle, par le sujet aussi bien que {par la vigucur et JB luciaité «le l'historien, celui que Mommsen donna de Gaïus Gracchus :} it mérite de figurer dans les manuels d'hisloire où, jusqu’à présent, l'idéalisme de Münzer s’éclipse totalement devant la robuste imédior crité de Luther qui « trahit Dieu pour la Force ». \
Cette découverte inspire à noire auteur une critique ‘ranchante de la philosophie et de la littérature classique allemandes. Exaspéré de voir systématiquement dissimulés ou passés sous silence, aux dépens des grands hommes des autres nations, les défauts di penseurs et poètes allemands. M. Ball s'est mis à analyser ces défauts avec une rare perspicacité. Et nous dirons que comme correctif d'une admiration exclusive, c’est utile, quoique cela puisse donner lieu À des injustices en sens inverse; Car oi ne saurai oublier qua les
Allemands ne sont pas les seuls qui soient dikposés À exagérer mérite moral el intellectuel de tout ce qui est à eux
C'est surtout envers Kant que M. Ball sa moniro trop sévère. Certes! Schopenhauer exagère, lorsqu'il dit que Kant à fait à la philobophie l'opération do la cataracte (pour ajouter que lui, Schopenhauer, nous a fourni les lunettes nécessaires après ectte opéralion). C'est gne injuslice envers ceux qui, avant Kant déjà, tvoyaient aussi clair que ui. Diminuons un peu la gloire immodéréo de 1 « Critique de la Raison pure», d'ailleurs. le moins bien écrit de tous les ouvrages de Kant. Ses autres livres en méritent pas moins . pleinement leur renommée. Est-ce la faute À Kant, pi Ses compatrioles ont totalement déliguré Je sens de son «üämpératif catfgorique » ? Celui-ci signifie, chez Kant, un empire complet de l'esprit sur les sppétits sensuels, La nation allemande Ya changé tn
le
[obéissance aveugle envers l'Etat-Major Général qui, à son tour,
n'aspire qu'à des buts matériels. Ce que M. Ball blâme surtout chez Kant, c'est qu'il se soumit au fameux « Kabinetsorder » du roi de Prusse, qui lui imiposa l'ordre da se taire, dorénavant, sur les questions religieuses. Ce n'était pas Le l’héroïsme, tant s'en faut; mais on n'en peul pas conclure que Kant eût obéi de même si ofn fui avait demandé derévoquer ses écrits. Déjà vieux et atfaïbli, il se fut jusqu'à la mort du roi, mais quant à révoquer, nous n'avons pas le droit de douter qu'il neût agi vamme Christ tian. Wolff, 0x1 comme les frères Grimm qui, avec quelques-uns de icurs collègues refusèrent de prête sernfent au roi, parce qu'il f'était montré pariure au sien. Ce n'est pas que l'Allemagne nfait pas eu de carac‘res sublimes ; mais les épigones les ont oubliés.
De cet oubli, M: Ball fait surgir Franz Baader (je dois avouer mon lncompélence À Son, égard), ainsi que Wälhelm Weïtling simple artisan, qui est devenu le fondateur du communisme chrétien en Allemagne. Mais, sur ces ailes, deux roitelets juifs 5e sont ee ; . la gloire mondiale: Karl Marx et Ferdinand Lassalle. nec abenton etes to et Or, M. Ball démontre -que nel ee da de Prusse di qu'alors déjà, le gouvernement prussien savait s'entretenir, par d'intenmédiaire un Üers,. avec les pgents ‘de cette
fut bel ft bien l'agent du noi
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