Les fêtes et les chants de la révolution française

F

Ja Marseillaise. Les documents, à défaut de récits contemporains, permettent de rectifier les erreurs, confusions et fantaisies provenant de ces sources, qui ne sont d’ailleurs pullement négligeables.

APPENDICE. 285

sur les causes de l'interdiclion de Hymne à l'Être suprême de Chénier :

L'on a objecté que cette interdiction ne pouvait pas avoir eu pour cause la personnalité de Chénier, par la raison que les strophes que le même Chénier avait composées sur l’air de la Marseillaise pour être chantées par le peuple au Champ de Mars ne furent l’objet d'aucune mesure analogue. À cela on peut répondre que, si l’'Hymne à l'Étre suprême fut, pour quelque raison que ce soit, l'objet dela réprobation de Robespierre, il se peut fort bien qu'il n'ait rien trouvé à redire aux strophes; il à pu aussi répugner à ce que Fhymne résumant le sentiment de la fête fût dû à un homme qu'il jugeait indigne de cet honneur, tandis qu'il pouvait admettre son concours pour la composition d’une poésie purement patriotique. Au reste, s'il voulait atteindre l'homme, Chénier l'était déjà, et d’une façon très sensible, par le coup qui frappait son Hymne à l'Étre suprême. Enfin, et je croirais volontiers que ce fut là la raison décisive, les strophes sur la Marseillaise furent maintenues par nécessité, parce que si on les eût supprimées encore il n'y aurait plus eu de fête à l'Être suprême, du moins plus de cérémonie au Champ de Mars : refaire encore cela eût été de toute impossibilité; il fallait donc se résigner à conserver cette partie du programme telle qu'elle avait été préparée par l’Institut de musique, sinon tout supprimer.

A propos de l’anonymat sous lequel Chénier, d'après son dire, se crut obligé de laisser longtemps le Chant du Départ, on a objecté que cetanonymat ne dura pas plus d'un mois. Cette réponse me paraît plutôt confirmative que rectificative. Un mois, à l'époque où nous sommes, cela est un fort long temps, etle fait reste constantautant que significatif : pour la première fois depuis qu'il imprimait des vers, Chénier, en messidor an II, crut imprudent de se déclarer l’auteur du Ghant du Départ.