Les serviteurs de la démocratie

222 LES SERVITEURS DE LA DÉMOCRATIE

Godefroy Cavaignac prit la parole après quelques-uns de ses amis. Il ne parla ni en rhéteur, ni en avocat, ni en accusé, Il s’exprima en apôtre et en martyr de l'idée républicaine. Son éloquence, sobre de mots, forte de choses, produisit à l'audience une linpression immense; aujourd'hui il est, impossible de lire sans émotion cette magnifique harangue. Tout d'abord Godefroy Cavaignac parla de ses amis ét de lui-même avec une modestie fière. Qui étaient-ils ? Des hommes de bonne volonté sans aucune Puissance ; mais ils incarnaient dans leurs personnes la majesté d’un droit imprescriptible et supérieur à toutes les législations imaginées par le despotisme. Vous invoquez contre nous, disait-1l, des articles du Code; vous vous servez nofammeul de l’article 294, qui appartient À une ki de l'empire, Et, Sous prétexie qu’on peut abuser du droit d'association vous le réglementez à votre fantaisie. « En général, messieurs les jurés, nous voyons qu’on abuse beaucoup des abus. De inême qu'il n’est pas un seul de nos Organes qui ne figure au dictionnaire des maladies, il n'est pas une seule de n0S facultés'qui ne subisse quelque article des lois. La chose dont l’homme à le plus fait abus, c'est la rage de faire des lois. » Et Godefroy Cavaignac ajoutait avec une vive éloquence : « Un philosophe ancien cherchait un homme sur la place publique d'Athènes : cherchiez une liberté dans la vie publique des Français. »

En présence de Ja législation exislante, concluait Cavaignac, nous avons résolu de braver vos menaces et de nous EXposer à des condamnations. « Nous nous plaçons en face de la loi, sous la protection des prineipes et nous lui disons : Tu PEUX nous punir de ce que nous ne {’observons pas, mais {u ne PEUX nous forcer de Le trouver juste et par conséquent de t'obéir, Nons