Les serviteurs de la démocratie

232 LES SERVITEURS DE LA DÉMOCRATIE

Personne en France n’a élé moins âpre à la domina- : tion politique que Cavaignac. Sans doute on doit condamner la violence de répression qui suivit les journées de combat. Les arrestations arbitraires de journalistes, les transportations sans jugement méritent les sévérités de l’histoire, La part de responsabilité qui incombe au général dans ces actes est-elle aussi considérable qu’on la prétendu ? Écoutons là-dessus son témoignage : Un jour, à l’Assemblée nationale, Pierre Leroux parlant contre l’état de siège, reprochait au vainqueur de l'insurrection de juin de n’avoir obéi qu'à des pensées de violence et de cruauté.

Cavaignac répliqua :

« M. Pierre Leroux a prétendu que nous nous étions montrés sans clémence et sans mansuétude. Je lui rappelle simplement que le 98 juin, après la victoire, il y a quelqu'un, et c’est moi seul, qui suis. monté à la tribune et qui ai plaidé pour la mansuétude et la clémence. Où étiez-vous alors, vous et vos amis? Avezvous pris la parole?...

» Quand la République est venue, je l’ai saluée de mon respect et de mon dévouement, je l'ai servie et ne servirai pas autre chose; — entendez-vous? — (Et indiquant du doigt le sténographe du HMoniteur officiel, le général ajoutait) : Écrivez ce que je viens de dire, je vous prie, Monsieur, écrivez-le mot à mot afin que cela reste gravé dans les annales de nos délibérations. Je ne servirai pas autre chose; j'ai fait plus que servir la République, je l'ai gouvernée, c’est un dépôt d’honneur que j'ai conservé, non pas comme un {ilre, mais comme une obligation, comme un devoir, et que je livrerai pur et sans faiblesse au jugement de la postérité, » :