Louis XVI et la Révolution

MARIE-ANTOINETTE. 71

solitude. L'instinct populaire, qui s’égare rarement en pareil cas, avait, à défaut des preuves matérielles que nous possédons maintenant, deviné que la reine de France n’avait pas le cœur français.

Surtout elle manquait d’une qualité bien française, si française que nous la poussons souvent jusqu'à l’excès : elle n'avait ni franchise, ni loyauté, elle était fausse. Elle-mêmereconnaissait tout au moins qu’elle était intrigante, ou plutôt qu’elle l'était devenue par la faute de ses conseillers : « Ah! ditelle un jour en soupirant à M Campan, il n'y a plus de bonheur pour moi depuis qu’ils m'ont faite intrigante.» Je me récriai sur ce mot. « Oui, reprit la reine, c’est bien le mot propre; toute femme qui se mêle d’affaires au-dessus de ses connaissances et Duc ne Cnorseuz. hors des bornes de son devoir n'est qu’une intrigante.» Sa nature la portait, du reste, assez à l'intrigue. Au témoignage du comte de Provence, elle était indiscrète. Elle laissait facilement échapper ses secrets, mais, en revanche, elle était habile, trop habile même, pour deviner ceux d'autrui: « Quand j'apprends le quart d’une affaire, disait-elle, j'ai besoin d'adresse pour me faire dire le reste par les ministres, en leur laissant croire que le roi m'a tout dit. » Elle ne dédaignait même pas d'écouter