Louis XVI et la Révolution

MARIE-ANTOINETTE. 75

ni serupule de manquer aux paroles données à son auguste frère. »

Si nous avons maintenant les preuves matérielles de cette duplicité, les contemporains en avaient des indices. Ferrières rapporte une conversation très instructive de Marie-Antoinette, au moment du voyage de Varennes. La veille de son départ, elle rencontra M. de Montmorin, et lui demanda s’il avait vu Madame Élisabeth; Montmorin répondit qu'il sortait de chez elle. « Elle m'affige, répliqua la reine; j'ai fait tout au monde pour la décider à assister à la procession de la Fête-Dieu ; elle paraît s’y refuser : il me semble pourtant qu'elle pourrait bien faire à son frère le sacrifice de son opinion. » L'instinct populaire, du reste, ne s’y était pas trompé : le peuple sen- TURGOT. tait qu'il ne pouvait pas compter sur la parole de la reine. Aussi, à la grande surprise de Besenval, Marie-Antoinette n'était-elle pas réellement populaire : « La reine était bonne, aimable, et pourtant déplaisante. En général, le publie, on ne sait pourquoi, n’aimait pas la reine. » Il fallait avoir la perspicacité d'un courtisan, ou la divination de cœur d’une mère, pour sentir que l'engouement bruyant du public n’était pas une popularité sérieuse, et qu’au fond l’on détestait sa fille. Le premier