Mémoire sur la Bastille
iv PRÉFACE
sujets, ou de trouver au besoin contre eux un asile formidable et respecté.
Bien que la Bastille ait emprunté la partie de l’enceinte de Paris dont elle prit le nom, il paraît douteux qu’elle ait eu pour objet principal de contribuer à la défense de la ville en cas de siège. Pourquoi l’eût-on placée à l’est, lorsque toutes les agressions anglaises partaient de Bordeaux, des côtes de Normandie, ou de Calais, c'est-à-dire du sud-ouest, du nord-ouest, ou du nord? La partie orientale était la plus abritée, non la plus menacée. Pourquoi, d'autre part, si elle devait ajouter quelque chose à la force des remparts, en avoir étendu les constructions à l'intérieur des remparts? Toujours, on le voit, pour qu’elle füt mieux protégée. Autre considération importante, celle-là tirée du droit administratif de l’époque : les remparts de Paris et leurs annexes se rattachaient au domaine et à la juridiction du prévôt des marchands et des échevins. La défaite d’Étienne Marcel, la condamnation de ses actes et de ses projets, ne firent point perdre son privilège à l'Hôtel de ville. Dans ce sujet « traître et félon », ül était prudent et politique de ne voir que l'individu, et non la fonction. Eh bien, ce ne fut pas à la prévôté des marchands que Charles V confia le soin d'élever la Bastille : ce fut à son prévôt à lui, au prévot de sa ville et vicomté de Paris, au chef de sa justice du Châtelet, au convocateur légal du ban et