Portalis : sa vie, et ses oeuvres
42 PORTALIS tion de l’édit de Nantes avait survécu longtemps à Louis XIV, et il semblait que, plus la corruption des mœurs et l’incrédulité s’étalaient à Versailles, plus le souverain avait à cœur de racheter les désordres de sa vie privée par un surcroît de rigueurs contre ses. sujets dissidents. Un grand ministre, Choiseul, dans ses efforts pour soutenir le déclin d’un règne avili, avait essayé de mettre un terme à ces cruautés. Les conversions par les armes avaient cessé ; mais il restait l'effroyable arsenal des lois rendues sous Louis XIV, et qui plaçaient en dehors de la société religieuse, politique et civile plusieurs millions de Français. Exclus de tous les emplois et de toutes les professions, chassés de tous les corps de métier, menacés des galères s’ils tentaient de quitter la France, réduits à la misère s'ils y restaient, les protestants étaient frappés dans leurs sentiments les plus chers et les plus sacrés. La famille n'existait pas pour eux : la loi ne reconnaissant que les mariages contractés devant un prêtre catholique, leurs femmes n'étaient , légalement , que des concubines , leurs enfants que des bâtards : ils se trouvaient ainsi placés dans la terrible alternative du déshonneur pour eux et pour les objets de leurs plus saintes affections ou d’une conversion forcée aboutissant au sacrilége. Malgré les instances de Choiseul, Louis XV refusait absolument d’adoucir cette loi barbare ; le clergé de cour lui persuadait que sa conscience Yétait engagée, et, de leur côté, les Parlements, aveuglés par nn
condamna publiquement l'ouvrage de Portalis, et celui-ci dut protester, dans un nouvel écrit, de la pureté de sa foi religieuse.