Portalis : sa vie, et ses oeuvres
AVOCAT 13 faux zèle, abandonnaient la jurisprudence qui avait, même sous Louis XIV, tempéré les sévérités de la législation. Les plus illustres magistrats prêtaient en vain leur voix à l'humanité outragée : M. de Moniclar parvenait à peine à dissiper les préventions de la Cour d'Aix; et, à Grenoble, l’éloquence de Servan échouaïit devant l'intolérance du Parlement.
Ce fut au milieu de cette discussion solennelle ouverte dans tous les Parlements de France et continuée par la polémique ardente des philosophes, que Portalis, à peine âgé de vingt-quatre ans, fut, en 1770, consulté par Choiseul.
Il répondit à la confiance du premier ministre par un chef-d'œuvre. Sa Consultation porte la lumière sur tous les points de la question et affirme, de la manière la plus nette, le droit des protestants. Il ne se borne pas à un exposé historique et à une discussion purement juridique; il fixe le débat sur le terrain des principes, il examine l'essence même du mariage, il fait appel aux grandes idées de tolérance qui sont l'honneur, la force et le signe d’une religion divine. Appuyé sur la raison, sur le bon sens, sur l’autorité de l'Église elle-même, il nie que la validité du mariage dépende de sa consécration religieuse; il déclare, comme l’a fait plus tard le Code Civil, que le mariage est de droit naturel, qu’il constitue un contrat primordial antérieur non-seulement à l’Église, mais à la so ciété, et que, si les lois civiles ont Le droit d’en régler la forme, elles ne peuvent en subordonner l’existence à l’'accomplissement d’un acte religieux qui est du res-