Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

16 INTRODUCTION.

le juge et le vengeur. La Martinique offrit à l'Angleterre une possession plus utile et moins dangereuse que St-Domingue. Les habitans de la première de ces colonies craignaient tout de la métropole inhumaine, qui, saisie d’an esprit de vertige, et par d’indignes commissaires , avait livré les blanes de StDomingue à la vengeance de leurs esclaves. Ils se rendirent aux Anglais. Ceux-ci ne leur imposèrent que des lois modérées. Sainte-Lucie et Tabago passèrent depuis sous leur domination. Ils occupèrent successivement, par la connivence des chefs militaires et des habitans, les colonies occidentales de la républiquebatave. Ils surent maintenir unesoumission profonde dans toutes ces îles et dans celles qui leur appartenaient déjà. Bientôt l’Europe n’eut plus à demander qu’à l'Angleterre des denrées précieuses dont les circonstances les plus rigoureuses ne modéraient pas les besoins.

L’Angleterre mit son attention principale à profiter des troubles du continent pour affermir et pour étendre au loin sa domination dans les Indes orientales. Jamais plus vaste conquête ne demanda moins d'efforts. Une compagnie de marchands l'exécuta avec une armée composée pour la plus grande partie, de troupés indiennes. L'empire de Tamerlan , depuis long-temps désolé par les révoltes de plusieurs gouverneurs, fut renversé. Les palais des princes indiens ne cessèrent d’être ensanglantés par des crimes dont les Anglais seuls reçurent le prix. La côte du Malabar subit le joug qui pesait depuis longtemps sur la côte de Coromandel. Le fils du célèbre HyderAly, Tippoo-Saïb, Intta seul, mais avec des désavantages constans, contre les Anglais , dont le lord Cornwalis dirigeait les mouvemens militaires avec habileté. La révolution française privait Tippoo-Saïb du sécours d’un allié sur lequel il avait compté pour maintenir et pour étendre la domination qu'avait fondée le courage de son père.

Ils manquait aux Anglais deux boulevards de leur empire sur la mer des Indes : c'était le cap de Bonne-Espérance et l’île de Ceylan. La conquête de la Hollande par lés Francais et l’alliance qu'avait faite avee eux la république batave, foarnirent aux Anglais le prétexte de s'emparer de ces points importans ; la lâcheté et la perfidie des gouverneurs et dés amiraux hollandais secondèrent leurs entreprises. Des vaisseaux et des'forts leurs furent livrés sans combat ; ils régnèrent seuls dans les Indes. Ils n’attaquèrent point les îles de la Sonde, ni les Moluques, mais les Hollandais, privés d’escadres qui pussent protéger les retours de ces colonies, virent passer dans les mains des Anglais le commerce des épiceries, dont ils avaient fait si long-temps le fructueux monopole.