Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits

pècher qu'elle ne fût enfoncée. Dans la chambre dite des pas perdus, je retrouvai le citoyen Wal, qui, à ce que je crois, attendait pour savoir quel serait le résultat de ma première démarche {pour apaiser les furieux); il me dit alors : Puisque vous n'avez pas eu le bonheur de réussir de ce côté, il faut descendre dans la cour pour leur parler ; ilest de votre devoir, citoyen syndic, de le faire. Je lui répondis: Vous me verrez toujours partout où mon devoir m'appelle, et je descendis sur-le-champ, mon bâton syndical à la main; il m'accompagna, en posant légèrement ses deux mains sur mes épaules, marchant à ma gauche et presque derrière moi, en me disant affectueusement : Oui, citoyen syndic, il faut leur parler, sûrement que votre présence les calmera. A Vinstant où ces forcenés me virent arriver, ils se portèrent en foule autour de moi, et dans un clin-d’œil je me trouvai au milieu d’un cercle épais et serré; ils ne parlaient pas; mais, comme des furieux, les plus éloignés s’élançaient en hurlant contre la foule, pour s'approcher de moi. Je distinguai particulièrement Brun le Marseillais, qui faisait les plus grands efforts pour m’aborder. Il est important d'observer que, pendant toute cette journée, il porta un grand couteau de cuisine dans la corne de son chapeau. Ils méconnurent mon caractère, m'insultèrent de la manière la plus outra-

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geante, sans qu’il me fül possible d'être écouté, quoique j'eusse demandé, à plusieurs reprises, de l'être. Un de ceux qui me serraient cria cependant, mais sans succès, allons, sac... un moment de silence; il veut dire encore quelque chose. Les cris de mort, précédés etaccompagnés d'horribles vociférations, retentissaient sans

cesse à mes oreilles. Dans ce moment vraiment épouvan-