Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

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« qu'arroser de ses larmes le sanctuaire de la liberté ». Gagnés par l'émotion, plusieurs membres du club proposent d'élever un buste au nouveau maire. Le patriote Dusaulx trouve la proposition anti-égalitaire, mais il presse Pétion dans ses bras pour le consoler, et tous deux se remettent à pleurer! Ils avaient le don des larmes. « [ls en versent en si grande abondance, lit-on dans l'Argus, que, s’ilsavaient eu de longues barbes, ils auraient ressemblé à des Tritons sortant des flots. » Pour calmer ces effusions touchantes, Morande invite Pétion à s'occuper des trottoirs et des égouts de Paris. « Un maire de Paris acquerra plus de gloire en s’occupant de ces détails essentiels de son administration qu’en allant verser des larmes à la tribune des Jacobins. » Il est plus beau de se dévouer à une ville de 800,000 âmes qu'à une société de 1,000 à 1,500 personnes. Le Gazetier cuirassé a compris l’incalculable puissance des Jacobins, dont les 5 ou 600 sections dominent la France entière et s’arrogent partout le contrôle du pouvoir exécutif. Dans son n° du 18 décembre, il dénonce à tous les patriotes cette usurpation redoutable :

Je ne blasphémerai point la Constitution en disant qu’il faudra bientôt opter entre l'Assemblée Nationale et les Jacobins; mais j’oserai dire que